vendredi 31 janvier 2014

Le Guerrier de l'Espace (Spacehunter adventures in a forbidden zone)

                                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site Moviecovers.com

de Lamont Johnson. 1983. U.S.A. 1h30. Avec Peter Strauss, Molly Ringwald, Ernie Hudson, Michael Ironside, Andrea Marcovici, Beeson Carroll, Grant Hallianak, Deborah Pratt.

Sortie salles France: 7 Septembre 1983

FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Lamont Johnson est un réalisateur, acteur, producteur et scénariste américain, né le 30 Septembre 1922 à Stockton (Californie), décédé le 25 Octobre 2010 à Monterey (Californie). 1967: A Covenant with Death. 1969: Haute tension dans la ville. 1970: L'Evasion du capitaine Schlütter. 1971: Dialogue de feu. 1972: Requiem pour un espion. 1976: Viol et Châtiment. 1978: Qui a tué mon cher mari ? 1983: Le Guerrier de l'espace. 1993: La Chaîne brisée. 1996: The man next door (télé-film). 1997: Le loup et le raven (télé-film) .


Pour sauver trois jeunes femmes prisonnières dans une zone interdite de la galaxie... Un aventurier et une rebelle de l'espace affrontent une planète dont personne n'est jamais revenu !

Sorti en pleine vague du post-nuke inauguré par Mad Max, Le Guerrier de l'Espace allie space opera et western futuriste avec une fougue bonnard. Car si le postulat s'avère des plus minimalistes (un guerrier solitaire tente de sauver trois jeunes femmes des griffes du dictateur Overdog !), l'intérêt se situe plutôt au niveau des personnages que notre héros principal fréquentera durant son périple. Embarrassé d'une adolescente impertinente, le guerrier Wolff est contraint de s'allier avec cette jeune inconnue avant que son vieil ami Washington ne vienne les rejoindre. L'attrait du film provient donc en grande partie de leur rapport conflictuel où leurs chamailleries abondent avec soupçon de tendresse toujours plus affirmée. Il faut dire qu'en dehors de son physique gentiment agréable, Molly Ringwald réussit à retransmettre spontanéité et fragilité pour mettre en valeur une bohémienne entêtée dénuée d'éducation. Dans celui du chasseur solitaire, Peter Strauss détonne dans son rôle à contre-emploi de héros faussement bourru car finalement humble à prêter main forte pour ses compagnons. S'il manque parfois de vigueur dans ces élans héroïques, l'acteur réussit à faire oublier son statut de star de série TV (le Riche et le pauvre) avec une décontraction assumée. 


Défavorisé par son modeste budget, Lamont Johnson réussit pourtant à dépeindre un univers post-apo particulièrement photogénique à travers ce désert rocailleux confiné sur la planète Terra 11. Afin de renforcer son caractère dépaysant, des filtres rouges et ocres vont charger l'atmosphère solaire dénué d'urbanisation. De par ces péripéties gentiment trépidantes et ses dialogues cocasses, le réalisateur compte à nouveau sur les personnages, cette fois-ci antagonistes, pour nous amuser et relancer l'intrigue. Tant auprès des nécrophages, des monstres gloutons, de la tribu d'enfants-mutants, des amazones, ou encore des vautours du Suprême surplombant le ciel ! Pour la gamme des engins motorisés (dont un navire scellé sur rail !) et du repère de la zone interdite, on songe inévitablement à la scénographie barbare imposée par Georges Miller et tous ces ersatz Z transalpins qui auront exploité le filon. Et si l'industrie post-apo parait aujourd'hui bricolée et peut prêter à sourire, elle n'en demeure pas moins crédible à travers son aspect à la fois bariolé et rubigineux, quand bien même les maquillages délirants confectionnés sur certains acteurs (Overdog en tête avec ces pinces métalliques robotisés !) semblent tout droit hérités d'une BD de science-fiction !


Epaulé d'un score orchestral épique et de la bonhomie de ces personnages héroïques, Le Guerrier de l'Espace repose sur la simplicité de péripéties éculées et l'aspect futuriste de l'environnement aride pour nous divertir en toute modestie. Il y émane un spectacle aussi innocent qu'attachant, une série B au charme rétro que la génération 80 se replongera avec une pointe de nostalgie. 

*Bruno
15.11.11
31.01.14. 
19.11.20. 5èx



jeudi 30 janvier 2014

LE PROJET BLAIR WITCH (The Blair Witch Project). Prix de la Meilleure 1ère oeuvre.

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

de Daniel Myrick et Eduardo Sanchez. 1999. U.S.A. 1h18. Avec Heather Donahue, Joshua Leonard, Michael C. Williams, Bob Griffith, Ed Swanson.

Sortie salles France: 28 Juillet 1999. U.S: 30 Juillet 1999

FILMOGRAPHIE: Daniel Myrick, né le 30 Novembre 1962 à Sarasota, Floride (Etats-Unis), est un réalisateur, scénariste, monteur, directeur de la photographie et producteur américain.
1999: Le Projet Blair Witch. 1999: Curse of the Blair Witch (Doc). 2004: The Strand. 2007: Believers. 2009: Ultimate Patrol.
Eduardo Sanchez est un réalisateur, scénariste et producteur américain d'origine cubaine, né le 20 Décembre 1968. 1999: Le Projet Blair Witch. 1999: Sticks and Stones: Investigating the Blair Witch (vidéo). 1999: Curse of the Blair Witch (Doc). 2006: Altered. 2008: Seventh Moon. 2009: ParaAbnormal. 2011: Lovely Molly. 2013: V/H/S 2 (segment: A ride in the Park). 2013: Four Corners of Fear. 2014: Exists.


Succès planétaire précédemment vanté par internet si bien que les réalisateurs ont eu l'habileté de répandre une fausse rumeur afin de nous faire croire qu'il s'agissait d'un vrai documentaire auquel les comédiens avaient réellement disparu (une idée juteuse inspirée par la combine de Deodato avec Cannibal Holocaust !), Le Projet Blair Witch reprend le concept du documenteur (prénommé aujourd'hui Found Footage, filon éculé jusqu'à la moelle !) avec une efficacité éprouvante ! A partir d'un pitch simpliste bâti sur la légende urbaine d'une sorcière, les réalisateurs Daniel Myrick et Eduardo Sanchez tentent de renouveler la peur sous pellicule grâce au procédé réaliste de la caméra portée à l'épaule. Si d'autres cinéastes avaient déjà emprunté avec succès cette méthode d'immersion au plus près du reportage (Punishment Park, C'est arrivé près de chez vous et l'inévitable Cannibal Holocaust), nos deux compères se sont ici surpassés pour provoquer la frousse avec leur budget dérisoire avoisinant 75 000 dollars.


Outre la véracité du jeu (improvisé) des comédiens en état de marasme, l'impact du Projet Blair Witch émane de sa scénographie forestière, environnement opaque de tous les dangers. La manière suggérée dont les réalisateurs s'y entreprennent pour insuffler un climat anxiogène découle notamment de l'attitude désemparée des protagonistes. Trois jeunes campeurs sans ressource, épuisés par la fatigue et la faim, se retrouvent désorientés, piégés au coeur d'une forêt lourde de secrets, essentiel antagoniste du récit ! Filmé en mode Vhs, la texture granuleuse et sépia de l'image doivent également beaucoup à l'effet d'immersion que le spectateur redoute avec une inquiétude toujours plus dérangeante. En jouant sur le mythe, la peur nocturne et les bruits suspicieux, à l'instar de chuchotements d'enfants ou d'un hurlement, mais en jonglant aussi sur les symboles du vaudou, Le Projet Blair Witch compte sur l'influence de la persuasion afin d'exacerber un sentiment de paranoïa. Au malaise diffus subtilement répandu, le spectateur semble, comme les protagonistes, aussi impliqué dans l'aventure et redoute la prochaine vision nocturne avec une fascination apeurée ! Quand bien même le fameux point de rencontre établi dans une maison insalubre, méandre délabré de l'inconnu, va atteindre son apogée de la terreur !


Avec une efficacité de suggestion et la persuasion viscérale des comédiens amateurs, Le Projet Blair Witch fascine, captive et éprouve avec une anxiété toujours plus redoutée. Rarement au cinéma une forêt n'aura été rendue aussi délétère, feutrée, malsaine et redoutablement mesquine. Pour preuve, et si vous en avez le courage, tentez d'aller faire un tour dans le fourré de votre région sitôt le générique écoulé !

BM
4èx

Récompenses: Prix de la Jeunesse en 1999
Prix de la meilleure première œuvre ayant un budget inférieur à 500 000 dollars, lors des Film Independent's Spirit Awards 2000.


mercredi 29 janvier 2014

I KNOW WHO KILLED ME

                                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site impawards.com

de Chris Sivertson. 2007. U.S.A. 1h47. Avec Lindsay Lohan, Julia Ormond, Neal McDonough, Brian Geraghty, Garcelle Beauvais, Spencer Garrett, Gregory Itzin.

Sortie salles U.S: 27 Juillet 2007

FILMOGRAPHIE: Chris Sivertson est un réalisateur, scénariste et producteur américain.
2001: All Cheerleaders Die (co-réalisateur). 2006: The Lost. 2006: The Best of Robbers. 2007: I know who killed me. 2011: Brawler. 2013: All Cheerleaders Die.


Conspué aux Razzie Awards au point de repartir avec 8 (pires) récompenses, I Know who killed me est loin d'être la daube que tout le monde s'est empressé de décrier. Le problème majeur avec cette série B attachante provient de son scénario aussi déstructuré qu'inabouti où nombres d'incohérences et questions sans réponses fusent. Après avoir été horriblement mutilée, Aubrey réussit in extremis à réchapper à son ravisseur. Recueillie dans un hôpital, elle se réveille avec la certitude de se prénommer Dakota. Persuadée d'avoir une soeur jumelle, elle décide de mener sa propre enquête afin de la retrouver et appréhender le tueur.


Si le début du film présage un slasher moderne façon tortur'porn, la suite s'oriente plutôt du côté du giallo avec son tueur fétichiste particulièrement inquiétant, d'autant plus pourvu d'une arme blanche singulière. Quand bien même l'élément le plus qualitatif concerne sa mise en scène stylisée particulièrement raffinée, renforcée d'une photographie flamboyante. Et à ce niveau, on sent que le réalisateur s'est appliqué à fignoler un esthétisme baroque où la fantasmagorie occupe une place de choix. En brassant les thèmes du double et de la gémellité, Chris Sivertson sème doute et confusion à travers les dérives hallucinogènes d'une héroïne en perte identitaire ! Egarée dans les eaux troubles de la schizophrénie, ou lucide d'avoir été piégée par une machination, sa quête de vérité est un cheminement tortueux où rêve et réalité se confondent afin de mieux nous confiner dans son dédale mental. Sans user de violence complaisante (même si 2/3 séquences graphiques s'avèrent corsées), Chris Sivertson privilégie plutôt le suspense latent auquel la dernière demi-heure va accroître son degré d'intensité. En prime, son climat irréel baignant parfois dans une poésie morbide héritée de Bava (le cercueil de verre et les pétales de rose bleue) séduit autant qu'il trouble par son aspect hermétique ! Si l'interprétation reste modestement appréciable, Lindsay Lohan réussit à s'y détacher en faisant preuve de plus d'implication pour incarner un double rôle en demi-teinte (l'étudiante docile vs la prostituée torturée).


Trop confus et inachevé pour emporter l'adhésion, I know who killed me ne manque toutefois pas de charme dans ses qualités formelles, dans l'entretien de son climat mystérieux et baroque afin de se différencier de la série B canonique. Quand à l'issue de l'intrigue, chacun pourra l'interpréter à sa propre manière, soit en se triturant les méninges, ou, à contrario, en acceptant sa trivialité. 

Bruno Matéï


mardi 28 janvier 2014

AMERICAN BLUFF (American Hustle). Meilleur Film, Golden Globes 2014

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site notrecinema.com

de David O' Russel. 2013. U.S.A. 2h18. Avec Christian Bale, Bradley Cooper, Amy Adams, Jeremy Renner, Jennifer Lauwrence, Robert De Niro, Louis C. K., Alessandro Nivola.

Sortie salles France: 5 Février 2014. U.S: 18 Décembre 2013

FILMOGRAPHIE: David Owen Russel est un scénariste, producteur, acteur et réalisateur américain, né le 20 Août 1958 à New-York.
1994: Spanking the Monkey. 1996: Flirter avec les embrouilles. 1999: Les Rois du Désert. 2004: J'adore Huckabees. 2010: Fighter. 2012: Hapiness Therapy. 2013: American Bluff



Dans la lignée de l'Arnaque de Georges Roy Hill et de Casino de Scorcese, American Bluff s'institue en fresque flamboyante pour disséquer les rouages d'une entreprise bâtie sur le mensonge et la manipulation. En 1978, un couple d'escrocs est contraint de négocier avec le FBI afin de faire tomber des politiciens véreux en relation avec la mafia. A partir de ce postulat basé sur des faits réels, David O' Russel réalise un film ambitieux traversé de fulgurances dans sa peinture caustique du rêve américain. Avec la participation exceptionnelle d'illustres stars issues de nouvelle génération et de l'apparition surprise de De Niro (sa confrontation laconique avec le Sheikh fondée sur le jeu de regard s'avère époustouflante d'intimidation !), American Bluff nous donne le vertige dans leur vaudeville improvisé au rythme d'une BO disco !


Avec une sidérante maîtrise technique et refus de la convention (notamment celui d'écarter toute forme de sexe et de violence !), David O' Russel transcende la forme d'une reconstitution des années 70, à l'instar de la tenue vestimentaire de chacun des protagonistes presque méconnaissables (mention spéciale pour notre caméléon Christian Bale, rendu ici bedonnant et apathique !). En ce qui concerne le fond, il dessine scrupuleusement l'étude psychologique de nos protagonistes avec un sens de loufoquerie inopiné, à tel point qu'à certaines situations, on se demande s'il faut en rire ou s'en inquiéter ! Jusqu'au point d'éprouver une certaine compassion dans certains revirements tragi-comiques (l'altercation dans les toilettes entre Sydney et Rosalyn SPOILER !!! et la trahison d'Irving avoué au maire devant le désarroi de sa famille ! FIN DU SPOILER). Alternant continuellement suspense et tension autour de l'implication des protagonistes mêlée aux enjeux de conspiration, American Bluff titille nos nerfs dans un surprenant panel d'émotions contradictoires où l'étude comportementale est assujettie à la manipulation et la trahison. Afin de corser l'intrigue, le réalisateur structure notamment une romance équivoque que nos compères vont se disputer sans jamais verser dans l'affrontement physique. Alors que Irving est épris d'un amour sincère pour Sydney, cette dernière va tenter de compromettre l'agent du FBI afin de prémunir ses propres intérêts. Une manière ostensible de tester aussi la fiabilité amoureuse de son amant ! Mais éprouve t'elle réellement des sentiments pour l'un et/ou pour l'autre, et qui emportera la mise ? Au même moment, Irving, déjà père d'un jeune garçon, est contraint de supporter la jalousie volcanique de sa jeune épouse Rosalyn. Avec l'intervention de cette femme désinvolte qui ne sait tenir sa langue dans sa poche et qui ose braver les interdits, les stratégies antécédemment négociées vont voler en éclat ! SPOILER !!! Même le spectateur, témoin attentif de tant de subterfuges et supercheries, finit lui même par se laisser berner par l'un des témoins clef ! FIN DU SPOILER


Sublimant la caricature d'escrocs redoutablement perspicaces et entretenant l'ambivalence dans les rapports conjugaux avec deux femmes pugnaces, American Bluff invoque la satire policière en bousculant nos habitudes de spectateur ! Sur ce point, David O'Russel ébranle nos émotions dans un climat fluctuant (voir parfois détraqué !) et par l'astuce d'un scénario toujours plus aléatoire ! Outre sa virtuosité technique scrupuleusement déployée, sa sensualité érotisée (les femmes ont un magnétisme ensorcelant !) et son sens oppressant de la répartie verbale, American Bluff est également un numéro d'acteurs au diapason, transcendant au passage la cause féministe ! Une confrontation impitoyable où ruse et intelligence restent les moteurs essentiels pour s'approprier le pouvoir ! 

Bruno Matéï

La critique de Gilles Rolland : http://www.onrembobine.fr/critiques/critique-american-bluff

Récompenses attribuées: 
Golden Globes 2014: Meilleur film, Meilleure Actrice: Amy Adams, Meilleure Actrice de Second Rôle pour Jennifer Lawrence.
Alliance of women film journalists Awards 2013: Meilleure Distribution
American Film Institute Awards 2013: Top 10 des meilleurs films de l'année. 
Black Film Critics Circle Awards 2013: Meilleur Scénario pour Eric Warren Singer et David O. Russell
Detroit Film Critics Society Awards 2013: Meilleure Distribution
Indiana Film Journalists Association Awards 2013: Meilleure Actrice de second rôle, Jennifer Lawence
Nevada Film Critics Society Awards 2013: Meilleure Actrice de second rôle pour Jennifer Lawrence
New-York Film Critics Circle Awards 2013: Meilleur Film, Meilleure Actrice de second rôle, Jennifer Lawrence, Meilleur Scénario pour Eric Singer et David O'Russell.
New-York Film Critics Online Awards 2013: Meilleure Distribution
Phoenix Film Critics Society Awards 2013: Meilleure Distribution, Meilleurs Costumes.
San Diego Film Critics Society Awards 2013: Meilleure Distribution
San francisco Film Critics Circle Awards 2013: meilleur scénario original pour Eric Warren Singer et David O. Russell, meilleure actrice dans un second rôle pour Jennifer Lawrence
Southeastern Film Critics Association Awards 2013: meilleur scénario original pour Eric Warren Singer et David O. Russell, meilleure distribution
Toronto Film Critics Association Awards 2013: meilleure actrice dans un second rôle pour Jennifer Lawrence
Festival International du film de Palm Springs 2014: Ensemble Cast Award
AACTA International Awards 2014: Meilleure actrice dans un second rôle pour Jennifer Lawrence
Meilleur scénario original pour Eric Warren Singer et David O. Russell
Central Ohio Film Critics Association Awards 2014: meilleure actrice dans un second rôle pour Jennifer Lawrence et Meilleure distribution
Critics Choice Movie Awards 2014: Meilleure Distribution, Meilleur Maquillage, Meilleure Comédie, Meilleure Actrice pour Amy Adams
National Society of Film Critics Awards 2014: Meilleure Actrice de second rôle pour Jennifer Lawrence
Screen, Actors Guild Awards 2014: Meilleure Distribution

lundi 27 janvier 2014

MATCH RETOUR (Grudge Match)

                                                                Photo empruntée sur Google, appartenant au site allocine.fr

de Peter Segal. 2013. U.S.A. Avec Sylvester Stallone, Robert De Niro, Kevin Hart, Alan Arkin, Kiml Basinger, Jon Bernthal, Paul Ben-Victor.

Sortie salles France: 22 Janvier 2014. U.S: 25 Décembre 2013

FILMOGRAPHIE: Peter Segal est un réalisateur, scénariste et producteur américain né en 1962
1994: Y'a t-il un flic pour sauver Hollywood ? 1995: Le courage d'un con. 1996: Président, vous avez dit président ? 2000: La Famille Foldingue. 2003: Self control. 2004: Amour et amnésie. 2005: Mi-temps au mitard. 2008: Max la menace. 2013: Match retour


Match Retour, ou le retour improbable de Stallone dans l'un de ses rôles qu'il affectionne tant au point de lui avoir valu sa renommée. Comment renouer avec le film de boxe en épargnant le ridicule quand deux champions sclérosés décident de s'affronter une ultime fois pour le dernier round de la revanche ? En réunissant à l'écran Sylvester Stallone et Robert De Niro, Peter Segal compte sur la confrontation de ces monstres sacrés afin de relancer l'intérêt d'une histoire que l'on connait par coeur. En prime, contempler sur l'écran deux boxeurs en déclin se combattre une dernière fois pour l'honneur a finalement quelque chose d'émouvant que le réalisateur ne va pas manquer de mettre en exergue vers l'issue de leur duel. A travers courage et constance mais aussi un dernier acte solidaire d'empathie et de considération jamais entrevu dans l'univers de la boxe, Match Retour laisse exprimer une émotion proprement bouleversante afin d'afficher le caractère noble de la vieillesse. Si le film comporte nombre de clichés et de bons sentiments (les retrouvailles en demi-teinte de Billy avec un fils qu'il n'a pas connu, l'ex compagne en rémission prête à reconquérir l'amour de sa vie), Match Retour réussit à faire passer la pilule grâce à la légèreté d'un humour trépidant ! Sans jamais se prendre au sérieux, Match Retour n'a donc comme unique optique de concevoir un simple divertissement bâti sur la drôlerie des situations et des joutes verbales. Qui plus est, avec un respect pour ses personnages attachants et sa scénographie rétro d'une époque révolue, le film entretient l'inévitable sympathie. 


En boxeur solitaire rattrapé par son ancien allié et son idylle de jeunesse, Sylvester Stallone invoque sa traditionnelle simplicité humaine hérité de Rocky sans vouloir dupliquer son personnage légendaire. Pas d'hommage au rêve américain ni de sens des valeurs donc si ce n'est celui d'estimer le cap de la vieillesse avec humilité. Ayant déjà oeuvré dans Raging Bull, Robert De Niro reprend les gants avec une fougue éloquente (limite parodique parfois, à l'instar de sa représentation d'humoriste lors d'un spectacle de cabaret) afin d'endosser un boxeur bourru habité par la revanche. Incroyablement séduisante du haut de ses 60 printemps, Kim Basinger interprète l'ex fiancée de Razor avec une émotion attendrie afin de renouer les retrouvailles. Si l'actrice ne semble pas toujours pleinement investie dans l'intensité de ses sentiments, elle réussit tout de même à dégager un charme vibrant dont les nostalgiques ne manqueront pas de s'émouvoir (elle fut l'une des grandes stars des années 80 !). En vieil entraîneur plein de sarcasme, Alan Arkin s'avère l'un des personnages les plus irrésistibles dans ses espiègleries impayables ! Il est secondé par Kavin Hart, assurant une verve presque aussi hilarante dans celui du mentor volubile obnubilé par l'argent. 


On s'attendait sans doute au match de trop avec cet ersatz de Rocky mais grâce au duo improbable constitué par Stallone/De Niro, à la bonhomie charismatique des seconds-rôles et surtout à l'humour qui enveloppe tout le récit, Match Retour sort miraculeusement de la redite et laisse en mémoire une récréation attractive pleine d'entrain et d'émotion ! 

Bruno Matéï


vendredi 24 janvier 2014

LA CASA DEL FIN DE LOS TIEMPOS

                                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site eventosvenezuela.com

de Alejandro Hidalgo. 2013. Venezuela. 1h36. Avec Rosmel Bustamante, Adriana Calzadilla, Gonzalo Cubero, Alexander Da Silva, Guillermo Garcia.

Sortie salles Venezuela: 21 Juin 2013

FILMOGRAPHIE: Alejandro Hidalgo est un réalisateur, scénariste et producteur vénézuélien.
2013: La Casa del fin de Los Tiempos


Accusée de l'assassinat de son mari et de la disparition de son fils, Dulce est condamnée à la prison. Libérée trente ans plus tard, elle décide de retourner dans son ancienne demeure afin de percer le mystère autour de l'enlèvement de son fils. 


Première réalisation du vénézuélien Alejandro Hidalgo, La Casa del fin de Los Tiempos est une obscure curiosité reprenant le concept de la maison hantée avec une originalité peu commune. En dépit de sa facture télévisuelle, le film réussit à accroître son intérêt grâce au soin accordé à son ambiance diaphane et surtout à la densité d'une narration redoutablement affûtée. A condition de ne pas perdre le fil de l'intrigue en cours de route et de rester concentré sur la complexité torturée des personnages, La Casa del fin de Los Tiempos aborde le thème spatio-temporel et celui de la spiritualité dans un postulat d'épouvante où des spectres farceurs n'auront de cesse de persécuter la famille Rodriguez. Mais il s'agit surtout d'un prétexte pour dépeindre l'histoire d'amour maternelle entre une mère et son fils, séparés du jour au lendemain par une obscure machination n'appartenant qu'à l'entité de la maison. La force du récit émane donc de cette psychologie meurtrie que cette veuve doit endurer depuis plus de 30 ans et sa seconde chance de renouer avec son passé tragique en bouleversant la destinée de ses proches. Alternant évènements du passé et du présent, Alejandro Hidalgo nous perd parfois dans un dédale cérébral mais démystifie la situation dans une dernière demi-heure vertigineuse en révélations. Si le film n'est jamais terrifiant dans ses tentatives escomptées, il réussit tout de même à distiller une certaine angoisse latente au sein d'une demeure décatie magnifiquement éclairée. Les décors baroques se prêtant harmonieusement à l'aspect gothique des pièces et divers objets de la maison, quand bien même certains endroits glauques rappelleront aux amateurs les galeries souterraines de l'Au-dela de Fulci. Enfin, le jeu de l'interprétation est notamment renforcé par l'humanisme prude de chacun des protagonistes, jusqu'aux rôles attribués aux enfants malmenés.


Inquiétant, original et hermétique, La Casa del fin de los tiempos pourra séduire les amateurs de curiosité atypique, tandis que d'autres reprocheront peut-être la complexité d'une intrigue tarabiscotée (trop) riche en rebondissements. Il s'agit en tous cas d'un cinéma noble dédié à l'atmosphère chère au fantastique où la sincérité du réalisateur ne peut être remise en cause. 

Bruno Matéï


mercredi 22 janvier 2014

BAD MILO !

                                                              Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

de Jacob Vaughan. 2013. U.S.A. 1h25. Avec Peter Stormare, Ken Marino, Gillian Jacobs, Stephen Root, Patrick Warburton, Mary Kay Place.

FILMOGRAPHIE: Jacob Vaughan est un réalisateur, scénariste, acteur et producteur américain.
2006: The Cassidy Kids. 2009: Krentz Presentz: Tyrannosaurus Rex ! 2013: Bad Milo


Dans la veine du cinéma underground de Frank Henenlotter, Bad Milo succède dignement au maître du mauvais goût dans son esprit décalé où humour sardonique et gore festif s'allient dans la bonne humeur. Le postulat de départ est à lui seul une énorme farce de potache lorsqu'un bureaucrate trop stressé finit par procréer une créature irascible par le trou de son anus ! Dès lors, si face à l'adversité Duncan est épris d'une contrariété ou d'une colère trop lourde à gérer, Milo sort de son rectum pour leur régler des comptes en les dévorant vivants ! Comédie horrifique menée sur un rythme sans faille car fertile en rebondissements et jeux de mots impayables (en épargnant son 1er quart d'heure inoffensif !), Bad Milo ne s'isole pas dans la catégorie Z tant l'habileté de sa mise en scène et le jeu des acteurs renforcent le caractère crédible d'un contexte si improbable.


En prime, l'utilisation judicieuse de sa partition orchestrale (on pense à Gremlins, Critters, voir aussi Elmer) permet d'accentuer sa tonalité mesquine où les gags fusent pour provoquer l'amusement. Qui plus est, sous ses dehors de bad-trip bête et méchant, Bad Milo bénéficie d'un scénario beaucoup plus substantiel qu'il n'y parait. Le film adoptant clairement une analyse psychanalytique (la répercussion de l'absence parentale) afin de disserter sur les effets néfastes du stress quotidien depuis que Duncan a coupé toute relation avec son père. En prime, une satire sociale est notamment allouée au monde de l'entreprise face à l'attitude égocentrique des bureaucrates misant sur leur autorité pour accéder au profit. Le dommage collatéral que subi donc Duncan par la faute de Milo (son moi intérieur) est donc une métaphore sur les effets pervers de la colère. Car cette créature engendrée par son système nerveux va finalement lui permettre de gérer ses angoisses afin d'élucider la fraternité amicale et familiale. En clair, pour vivre en harmonie et trouver l'équilibre de l'épanouissement, usons de notre honnêteté, de notre courage et surtout de notre esprit d'équipe afin de mieux déjouer nos démons.


Sarcastique, débridé et inventif, voir même épris d'une touche de tendresse, Bad Milo est l'étendard du Dtv aussi généreux que sincère dans sa démarche ludique débouchant sur une belle leçon d'éducation, de tolérance et de fraternité. Une belle surprise et un hommage affectueux aux séries B des années 80.
   
Clin d'oeil à Jérome Didierjean
Bruno Matéï


mardi 21 janvier 2014

CHARLIE COUNTRYMAN (The Necessary Death of Charlie Countryman)

                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site comingsoon.net

de Fredrik Bond. 2013. U.S.A. 1h48. Avec Shia LaBeouf, Mads Mikkelsen, Evan Rachel Wood, Rupert Grint, Til Schweiger, Vincent D'Onofrio, Vanessa Kirby, Melissa Leo

Sortie salles France: 7 Mai 2014. U.S: 21 Janvier 2013 (Festival de Sundance)

FILMOGRAPHIE: Fredrik Bond est un réalisateur américain.
2013: Charlie Countryman


Ovni indépendant sélectionné à Sundance, Charlie Countryman brosse le portrait d'un trentenaire solitaire embarqué dans une aventure houleuse. Lourdement éprouvé par la mort de sa mère, Charlie décide de tout plaquer pour s'enfuir vers Bucarest. A bord de l'avion, sa rencontre fortuite avec un passager va bouleverser son destin. Celui de tisser une relation amoureuse avec Gaby, la fille du voyageur, quand bien même des tueurs sont lancés à leur trousse.


Love story menée tambour battante dans son alliage d'action, de poésie surréaliste et d'humour caustique, Charlie Countryman a de quoi rebuter le spectateur peu habitué à se laisser convaincre par une intrigue sommaire dont les situations délirantes et les rencontres insolites contournent la convention. C'est surtout une aventure humaine que Fredrik Bond nous relate avec un sens lyrique, une réflexion spirituelle sur le hasard du destin que notre héros va tenter de démystifier dans sa quête amoureuse. Outre ses secondes têtes d'affiche reconnues (Mads Mikkelsen, Evan Rachel Wood), le film doit beaucoup à la présence diaphane de Shia LaBoeouf (son meilleur rôle à ce jour !). L'acteur exprimant avec humanisme la peur de l'abandon et de l'échec quand Charlie vient de perdre sa mère et qu'il doit faire face à la dangerosité d'une bande de tueurs intraitables. Discret, maladroit mais habité par la fougue amoureuse et désireux de dépasser ses peurs pour accéder à la considération, Charlie est aujourd'hui convaincu que la mort pourrait être légitime afin d'honorer la valeur de l'amour. Baignant dans un climat baroque de visions spirituelles et de situations absurdes où le comportement des protagonistes renforcent le caractère décalé, Charlie Countryman met notamment en relief des moments d'exaltation quand les deux amants se laissent happés par le désir des sentiments. Mais leur prémices amoureuse desservie par l'autorité du criminel Nigel va relancer une course-poursuite toujours plus dangereuse en plein coeur d'une ville fantasmatique.


Une vie moins ordinaire
Conte métaphysique sur les souvenirs néfastes et l'instant de l'existence auquel le hasard n'a pas lieu d'être, Charlie Countryman déconcerte et séduit pour retransmettre la fougue amoureuse de deux âmes en peine de rédemption. Au rythme d'une bande rock électro et sous l'emprise de drogues synthétiques en accord avec son climat désincarné, Charlie Countryman enivre et bouscule nos habitudes sans avoir la prétention de le rendre exceptionnel. Avec l'humilité de l'amour.

Dédicace à Pascal Frezzato
Bruno Matéï 


lundi 20 janvier 2014

THE TRUTH ABOUT EMMANUEL

                                                                        Photo empruntée sur Google, appartenant au site filmzvf.com

de Francesca Gregorini. U.S.A. 2013. 1h36. Avec Kaya Scodelario, Jessica Biel, Alfred Molina, Frances O'Connor, Aneurin Barnard, Jimmi Simpson.

Sortie salles France: Prochainement. U.S: 10 Janvier 2014

FILMOGRAPHIE:  Francesca Gregorini est une réalisatrice, productrice et scénariste américaine, née le 7 Août 1968 à Rome. 
2009: Tanner Hall. 2013: The Truth about Emanuel


Drame psychologique alloué à l'affliction maternelle, The Truth about Emanuel joue la carte de l'intimité avec une pudeur trouble. Sa mise en scène autonome préférant se focaliser sur l'ambiance feutrée d'états d'âme en quête de rédemption. Emmanuel, jeune fille introvertie, ne parvient pas à accepter la mort de sa maman au moment de son accouchement. Un jour, elle fait la rencontre de Linda, une voisine solitaire vivant recluse parmi son nourrisson. Sauf qu'en l'occurrence, le bébé est un jouet de substitution afin de pallier la disparition brutale du vrai rejeton. Pour ne pas la perturber, Emmanuel accepte le jeu d'exercer des séances de baby sitting à son domicile. Au fil du temps et de leur confiance, les deux jeunes femmes finissent par entamer une liaison amicale, jusqu'au jour où la vérité est dévoilée au grand jour !


En cinéaste indépendante privilégiée par le Festival de Sundance, Francesca Gregorini élabore une oeuvre fragile toute en psychologie pour ausculter l'alliance amicale de deux femmes égarées dans les eaux troubles de leur névrose. Reposant sur les frêles épaules de Jessica Biel et surtout Kaya Scodelario, The truth about Emmanuel trouve la sobre mesure pour nous émouvoir avec une discrétion presque timorée et parmi l'entremise de plages de poésie en relation avec la nature (l'eau et les étoiles ont une signification spirituelle dans les songes oniriques d'Emmanuel !). En jouant sur l'exubérance finaude d'une jeune fille difficilement apprivoisable, Kaya Scodelario étoffe un joli portrait féminin où ses sentiment de désarroi et de culpabilité ne nous sont pas affichés en spectacle. Sa sensualité naturelle littéralement magnétique permettant en outre d'extérioriser un climat d'étrangeté lattent qui va planer durant tout son cheminement. En second plan, Jessica Biel insuffle la même tempérance de composition mais en insistant sur le trouble affectif (plus préjudiciable) d'une femme ruinée par la perte de son bambin.   


Avec l'alibi d'un étrange script privilégiant l'émotion sobre et avec la cohésion de deux actrices issues de nouvelle génération (j'insiste à dire que Kaya Scodelario doit beaucoup de sa présence insolite pour prédominer inquiétude et empathie), The Truth about Emanuel détourne les conventions du drame par une réalisation sans fioriture, jusqu'au final mystique assez bouleversant. 

Dédicace à Pascal Frezzato
Bruno Matéï

jeudi 16 janvier 2014

ALABAMA MONROE (The Broken Circle Breakdown)


                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

de Felix van Groeningen. 2012. Belgique. 1h52. Avec Veerle Baetens, Johan Heldenbergh, Nell Cattrysse, Geert Van Rampelberg, Nils De Caster, Robby Cleiren, Bert Huysentruyt, Jan Armoise, Blanka Heirman.

Récompenses: César du Meilleur Film Etranger, 2014
Label Europa Cinemas du Meilleur Film européen, Prix du Public Panorama, 2013
Prix du Meilleur Scénario au Festival du film de Tribeca, 2013.
Prix du Public au Festival CPH PIX à Copenhague.
Prix Ensor du Meilleur Film, Meilleur Réalisateur, Meilleur Montage, Meilleurs Costumes, Meilleure musique, Meilleure Photographie, Meilleure Actrice, Veerle Baetens, Meilleure Direction Artistique, Prix de l'Industrie pour Van Lauwereys au Festival du film d'Ostende.
Meilleure Actrice, Veerle Baetens au European Films Awards à Berlin.
Nomination aux Oscars pour le film en langue étrangère, 2014

Sortie salles France: 28 Août 2013. Belgique: 9 Octobre 2012

FILMOGRAPHIE: Felix van Groeningen est un réalisateur belge flamand, né à Gand en 1977.
2000: 50CC. 2004: Steve + Sky. 2007: Dagen zonder lief (des jours sans amour). 2009: La Merditude des Choses. 2012: The Broken Circle Breakdown


Electrochoc d'une intensité émotionnelle traumatisante, à tel point que des larmes s'épanchent sur mon clavier au moment même où j'essaie d'extérioriser mes impressions, Alabama Monroe est un drame sur le deuil infantile du point de vue parental. Le réalisateur se focalisant sur la reconstruction du couple après que leur fille eut été emportée par un cancer.


En alternant les évènements du passé et ceux du présent, le réalisateur établit un contraste entre les joies de l'épanouissement et l'infortune funeste vis à vis d'une relation conjugale. Lui, est un chanteur féru de country music, athée et caractériel. Elle, est une tatoueuse de métier, croyante et spontanée. A eux deux, ils forment un couple harmonieux auquel le mariage finira par les unir pour le meilleur et pour le pire. Au rythme de la country chantonnée dans les vieux cabarets à guichet fermé, Felix van Groeningen nous entraîne dans un tourbillon musical auquel l'icone des tatouages et la nature spirituelle vont venir cristalliser une réflexion inhérente sur la foi. Avec une émotion viscérale au plus près de l'affliction des parents, le réalisateur observe leur divergence d'opinion fondée sur le fondement catholique et le nihilisme du néant. Quand bien même Didier et Elise accumuleront les disputes dérisoires pour se reprocher mutuellement la mort de Maybelle. A travers leur destin, où l'alchimie du bonheur et l'épreuve du malheur ne cessent de se télescoper, le réalisateur scande notamment l'hymne existentiel au sein d'une nature candide, en y opposant l'idéologie optimiste (la foi en la réincarnation) et le défaitisme de la désillusion (la résolution du néant). Cette rancune furibonde engendrée par Didier (notamment sa remise en cause du fondamentalisme ricain réfrénant le progrès médical) va confiner le couple dans une discorde psychologique destructrice, quand bien même Elise était prête à pardonner la fatalité du deuil. L'affrontement moral, la violence de leurs sentiments vont atteindre un point de non-retour, avant qu'une perspective d'aspiration ne vienne bousculer les repères de Didier !


Vivre et mourir
Sans aucun sentimentalisme outré et avec l'aide d'un habile montage, Felix van Groeningen délivre sans anesthésie un portrait sensitif sur ce couple en berne, incapable de surmonter l'obstacle du deuil, faute de leur chagrin et d'une philosophie antinomique. Mais avec le pouvoir exaltant de la country et la destinée mystique d'un volatile, Alabama Monroe en extrait finalement une élégie incandescente inscrite dans la croyance. Avec son thème délicat traité avec autant de dignité et refus de voyeurisme, Alabama Monroe est un crève-coeur d'une intensité difficilement gérable (jusqu'au malaise !), que les comédiens, transis d'expression viscérale, vont immortaliser dans leur écorchure meurtrie.  
Pour public averti

La critique de La Merditude des Choses (la): http://brunomatei.blogspot.fr/…/la-merditude-des-choses-de-…

Dédicace à Jenny Winter
Bruno Matéï


mercredi 15 janvier 2014

A.C.A.B.: All Cops Are Bastards. Prix sang neuf, Beaune 2012.


                                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site movpins.com

de Stefano Sollima. 2012. Italie. 1h30. Avec Pierfrancesco Favino, Filippo Nigro, Marco Giallini, Andrea Sartoretti, Domenico Diele, Roberta Spagnuolo.

Sortie salles France: 18 Juillet 2012. Italie: 27 Janvier 2012

Récompense: Prix sang neuf au Festival International du film policier de Beaune, 2012

FILMOGRAPHIE: Stefano Sollima est un réalisateur italien, né le 4 Mai 1966 à Rome.
2012: A.C.A.B.


Pour rappel, A.C.A.B. (All Cops are Bastards / "Tous les flics sont des batards") est un sigle d'intimidation exploité par les skinheads anglais durant les années 70. Avec souci de réalisme au coeur des affrontements, le film relate la quotidienneté d'un trio de CRS contraints d'exercer leur métier dans un climat de haine omniprésent. A la suite de l'agression sanglante d'un de leur comparse et de la mort d'un policier, ils décident de retrouver les responsables afin d'appliquer la loi du talion.


Témoignage choc d'une Italie en pleine dérive fasciste, Stefano Sollima dresse un constat alarmant d'une société de crise où chômage, racisme et insécurité font bon ménage. A travers la dérive réactionnaire d'une section policière, le réalisateur met en exergue la contagion de la violence quand des CRS sont couramment provoqués par des fouteurs de troubles à la sortie des stades. Contraints de canaliser leur peur et leur colère face à une situation houleuse qui pourrait à tous moments dégénérer, ils doivent éviter l'usage de la matraque pour riposter aux agressions. Défavorisés par leur manque d'effectif, déconsidérés par leur supérieur et réputés comme des "bâtards" par la jeunesse marginale, nos trois comparses doivent également gérer une vie conjugale déstructurée. Cette insécurité régie à l'intérieur des villes découle notamment du traitement de faveur infligé à l'affluence des roms et des sans-papiers. Quand bien même les habitants italiens les plus défavorisés se retrouvent le plus souvent occultés par leur gouvernement afin de récupérer un logement décent. Avec l'entremise de skinhead toujours mieux organisés pour perpétrer leur dictature, Stefano Sollima dresse un état des lieux d'une montée de la xénophobie, que ce soit du camp des délinquants que celui même des forces de l'ordre. Car nos ripoux déboussolés, sévèrement bafoués par le sentiment d'injustice, vont finalement se résoudre à répercuter la même violence gratuite dans leurs pulsions vindicatives. L'intensité du film réside donc dans la pression psychologique de cette milice policière, délibérée à exploiter leur symbole d'autorité pour se venger des humiliations et agressions quotidiennes pratiquées en interne de leur profession.


Baignant dans un climat d'insécurité inquiétant où la tension s'avère toujours aussi progressive (à l'instar de sa BO rock endiablée !), A.C.A.B rend hommage au métier ardu des CRS pour leur flegme imparti au maintien de l'ordre en cas d'évènements populaires. Plus inquiétante est la dérive réactionnaire infligée ici à l'insigne policier et le constat d'échec de la violence urbaine que nos politicards ont finalement engendré par leur laxisme et leur incompétence. Un cri d'alarme édifiant !

Dédicace à Stéphane Passoni
Bruno Matéï

mardi 14 janvier 2014

The Spectacular Now

                                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site notrecinema.com

de James Ponsoldt. 2013. U.S.A. 1h35. Avec Miles Teller, Shailene Woodley, Brie Larson, Jennifer Jason Leigh, Mary Elizabeth Winstead, Kyle Chandler.

Sorties salles France: 8 Janvier 2013. U.S: 18 Janvier 2013

FILMOGRAPHIE: James Ponsoldt est un réalisateur et scénariste américain, né en 1978
2006: Off the black. 2012: Smashed. 2013: The Spectacular Now 


Je m'appelle Suther Kelly et j'ai 18 ans. Par rapport aux autres enfants, je n'ai pas eu beaucoup d'épreuves à surmonter. Pas vraiment. Des problèmes me sont arrivés, c'est sûr. Mais les problèmes, ça arrive tout le temps, non ? Mais le vrai challenge dans ma vie, la vraie épreuve... C'est moi. Ca a toujours été moi. Aussi loin que je m'en souvienne, je n'ai jamais eu peur. Peur de l'échec... De laisser tomber les gens... De les blesser... D'être blessé. Je pensais que si je baissais ma garde et que je me concentrais sur d'autres choses... Si je ne pouvais même pas la sentir, alors aucun mal ne m'arriverait. J'ai foiré. Non seulement, je me suis fermé à la douleur, mais je me suis fermé à tout le reste. Le bon et le mauvais. Jusqu'à ce qu'il n'y ait plus rien. C'est bien de vivre dans l'instant présent, mais la meilleure chose à propos du présent, c'est qu'il y aura un autre demain. Et je vais faire en sorte qu'il ait de l'importance. Bien à vous. Sutter Kelly. 

The Spectacular now, ce moment précis de l'instant présent où tout peut arriver ! L'alternance du blanc et du noir, la névrose du doute et de l'espoir ! L'instant suprême où notre raison d'exister peut être reconsidérée à tous moments ! Mélo sentimental où le concept de l'amour est élevé à son niveau le plus candide, The Spectacular now s'achemine en parallèle vers le cri d'alarme d'une démission parentale. En l'occurrence, celui d'un père déchu incapable d'apporter un regain d'attention envers sa progéniture et celui de sa famille. Un quadra paumé préférant sillonner les bars malfamés en compagnie d'une aguicheuse d'un soir plutôt que de se soucier de l'avenir de son rejeton. Ainsi, à travers l'idylle naissante de deux adolescents, le réalisateur radiographie l'introspection douloureuse d'un jeune étudiant, Sutter Kelly lourdement éprouvé par l'absence de ce père alcoolique. Ce manque d'amour et d'attention se répercutent inévitablement sur son équilibre moral et celui de ses études scolaires, jusqu'à ce que l'alcool devienne un palliatif pour apaiser sa conscience. Mais au hasard d'une rencontre amoureuse, son destin va bouleverser la donne jusqu'à ce que l'instant présent, si vanté dans ses principes, soit reconsidéré pour aborder une éventuelle postérité.


Au détour d'un bouche à oreille élogieux ou d'une récompense suprême (Prix Spécial du Jury à Sundance), certains films indépendants vous abordent sans prévenir et vous entraînent dans un vortex d'émotions où la magie du cinéma renoue avec l'angélisme le plus épuré. Car emporté par la grâce des deux jeunes interprètes (ils dégagent un jeu naturel aussi prude que spontané à l'instar de leur physionomie ordinaire sans fard !), The Spectacular Nox réinvente la thématique de l'amour avec une simplicité digne. Exit donc la convention du pathos et les clichés impartis au teen movie trivial, James Ponsoldt n'ayant point besoin de sortir les violons pour faire pleurer dans les chaumières ! Ainsi, en jouant sur la complicité pleine de fraîcheur de ces deux comédiens, le réalisateur aborde des instants de grâce d'un réalisme ténu. Au plus près de leur relation inscrite dans la tendresse et la confiance, The Spectacular Now émule leur fragilité avec une dimension psychologique bouleversante. Notamment du point de vue de Sutter, lourdement accablé par le dépit depuis ses retrouvailles avec son père. Cette manière épurée d'y filmer son désarroi et son chagrin nous terrassant d'émotions, à l'instar des échanges sentimentaux que les amants se livrent avec compassion. L'incroyable pureté qui se dégage des moments d'intimité (leur première relation sexuelle) nous ébranlent le coeur, notamment parce qu'elle nous rappelle notre premier émoi amoureux. On peut en dire autant du réconfort maternel que Sutter éprouve avec une douloureuse considération (sa confiance est enfin retrouvée par la parole noble de sa mère !) et du bonheur communautaire qu'il éprouve en regardant danser ses camarades de classe au sein du bal promotionnel. Ce florilège d'émotions, le réalisateur les véhiculent avec son intégrité humaine en comptant sur la prestance incandescente des jeunes acteurs en ascension de par leur douleur moral qu'ils traversent entre la contradiction de l'espoir, de la rancoeur et de l'amertume.


De manière simple mais authentique, The Spectacular Now réinvente la notion romanesque parmi l'expérience trouble de l'adolescence ici malmenée de démission parentale découlant d'une crainte de souffrir. Il en découle un cheminement initiatique confronté à l'apprentissage de la maturité, où la remise en question demeure une catharsis afin de s'épargner le poids de la culpabilité et du remord. Un moment de cinéma sensitif en somme confinant au vertige mais débordant d'espoir et d'optimisme au final même s'il faut prévoir les mouchoirs pour une bonne cause. 

Récompenses: Prix Spécial du Jury des meilleurs acteurs, Miles Teller, Shailene Woodley au festival de Sundance, 2013
Grand Prix du Jury "Future Wave Feature".
Meilleur Film passé inaperçu (ex-aequo avec The Kings of Summer).
Meilleure Actrice de second rôle pour Shailene Woodley

*Bruno 
16.06.22
14.01.14