mercredi 30 avril 2014

Predator

                                                                       Photo empruntée sur Google, appartenant au site futurefantastique.com

de John McTiernan. 1987. U.S.A. 1h47. Avec Arnold Schwarzenegger, Carl Weathers, Elpidia Carrillo, Bill Duke, Jesse Ventura, Sonny Landham, Richard Chaves.

Sortie salles France: 19 Août 1987. U.S: 12 Juin 1987

FILMOGRAPHIE: John McTiernan est un réalisateur et producteur américain, né le 8 janvier 1951 à Albany à New-York. 1986: Nomads. 1987: Predator. 1988: Piège de Cristal. 1990: A la Poursuite d'Octobre Rouge. 1992: Medicine Man. 1993: Last Action Hero. 1995: Une Journée en Enfer. 1999: Le 13è Guerrier. 1999: Thomas Crown. 2002: Rollerball. 2003: Basic.


Remember, 1987, date à marquer d'une pierre blanche. John McTiernan accomplissant avec Predator un véritable coup de maître pour son second long reconnu depuis comme un classique incontesté. Sans doute inspiré par Terreur Extra-terrestre de Greydon Clark, série B culte au pitch similaire avec le même acteur du rôle-titre), mais aussi de Wolfen de Michael Wadleigh (pour la vision thermique de la créature), John Mc Tiernan opte pour le divertissement à grand spectacle en y combinant film de guerre en vogue (Rambo, Commando, Portés Disparus) et science-fiction rubigineuse (les référentiels Alien et sa suite, X Tro). Démarrant sur les chapeaux de roue avec la mission périlleuse d'un commando parti récupérer un éminent otage en pleine cambrousse, Predator frappe d'emblée par l'ampleur de sa mise en scène dont l'impact des scènes homériques nous laisse déjà le souffle coupé ! Cette petite mise en bouche déjà jouissive n'est rien comparée aux prochaines motivations prédatrices d'un extra-terrestre férue de trophées humains ! C'est donc ici une chasse à l'homme singulière que nous relate le réalisateur par l'intermédiaire d'un rapace redoutablement pernicieux car roi du camouflage et du plaisir de la traque !


Sur le papier, si le scénario peut s'avérer de prime abord risible et aurait sans doute sombré dans la gaudriole Z auprès d'un aimable tâcheron, John Mc Tiernan en extrait un opéra d'action et de violence au souffle primitif ! (voir l'incroyable point d'orgue au cours duquel s'affrontent sauvagement Dutch et le prédateur !). Porté sur les épaules de la montagne de muscles des années 80, Arnold Schwarzenegger  en impose d'ailleurs autant de sa posture saillante pour faire face à la stoïcité de son adversaire. Conçu par Stan Winston, le monstre au look rasta pourvu de gadgets meurtriers s'avère si impressionnant qu'il est depuis entré dans la légende du bestiaire fantastique afin d'égaler le xénomorphe Alien ! Mais avant ce duel homérique resté dans les annales par son ampleur formelle et sa férocité explosive, John Mc Tiernan nous aura peaufiné un redoutable survival lorsqu'une équipe d'élite se retrouve piégée par une présence hostile en interne d'une jungle. Incroyablement photogénique, ce milieu forestier semble véritablement se partager la vedette avec l'ennemi invisible tant le cinéaste exploite à merveille sa végétation très dense où la paranoïa de l'homme est notamment réduite à l'état de soumission. Ce sentiment d'insécurité permanent régi au coeur de la flore demeure d'autant plus palpable par l'anxiété des protagonistes en perdition, sachant que le prédateur se fond facilement à travers la végétation à l'aide d'une combinaison électronique pour mieux les alpaguer.


Véritable leçon de mise en scène exploitant à merveille l'immensité du décor naturel et la convoitise d'une créature protéiforme infiniment ensorcelante et démoniale, Predator marque également de son empreinte un duel au sommet géré entre le survivant et l'étranger, communément épris de rage de vaincre afin d'y asseoir leur suprématie. Chef-d'oeuvre formel baignant dans une dimension mythologique quand bien même la vigueur des combats et de la musique épique redoublent de fulgurance émotionnelle, Predator est probablement l'un des plus grands films d'action génialement combiné à une science-fiction horrifique en vogue qu'Alien(s) imprima de son empreinte liminaire. 

La Chronique de Predator 2: http://brunomatei.blogspot.fr/2016/08/predator-2.html

*Bruno
4èx


                                                 

    mardi 29 avril 2014

    WOLF CREEK 2

                                                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site kinostar.com

    de Greg McLean. 2013. Australie. 1h47. Avec John Jarratt, Ryan Corr, Shannon Ashlyn, Philippe Klaus, Gerard Kennedy, Annie Byron.

    Sortie salles France: Prochainement...

    FILMOGRAPHIE: Greg McLean est un réalisateur, scénariste et producteur australien.
    2005: Wolf Creek. 2007: Solitaire. 2014: Wolf Creek 2.


    9 ans séparent Wolf Creek de cette séquelle et le moins que l'on puisse dire c'est que l'attente en valait la chandelle ! Non pas que je trépignais d'espérer une suite à un panthéon de l'horreur qui se suffisait à lui même, mais que ma curiosité emportait finalement le dessus à savoir si Greg Mclean allait habilement relever la tâche pour ne pas se laisser influencer par le produit standard !
    Ca débute fort avec une séquence d'ouverture donnant d'emblée le ton crapuleux ! Un duo de flics zélés s'en prend à notre tueur australien lors d'un simple contrôle de routine ! Bien entendu, les rapports de force vont s'affronter à coups de réparties provocatrices, juste avant de virer à une vendetta criminelle et inverser les rôles de soumission ! Avec ce prologue percutant n'épargnant aucune chance aux victimes, on reconnait bien la patte du réalisateur à illustrer de manière cruelle des mises à mort cinglantes car d'un réalisme quasi insupportable ! Si la suite nous laisse craindre qu'un couple de touristes allemands va à nouveau se retrouver pris en otage et subir les frais du tueur, Greg Mc Lean opte pour une autre orientation avec l'intervention d'un nouveau pèlerin isolé, témoin malgré lui. Ainsi, à partir d'une intrigue plutôt bien élaborée car oscillant efficacement l'action spectaculaire (un accrochage sur bitume rappelant les poursuites endiablées de Duel !), revirements inopinés et intervention aléatoire de protagonistes secondaires, le cinéaste reformule le mode du survival du point de vue d'un seul et unique survivant.


    Avec intensité et sens du suspense exponentiels pour la destinée de l'otage, Wolf Creek 2 renoue donc avec l'horreur hardcore tristement actuelle lorsqu'un serial-killer plus vrai que nature décide de nuire à autrui. Faisant preuve d'un humour noir terriblement inconfortable, Greg Mc Lean relance ensuite l'intérêt avec la nouvelle tâche du tueur suggérant à sa victime un défi. Celui de "questions pour un champion" ! Parodie sardonique à graver dans les annales ! Ces séquences de confrontation psychologique entretenues entre les deux rivaux suscitant une montée graduelle de la tension, dans la mesure où le survivant tentera en désespoir de cause et à multiples reprises de s'emparer d'un marteau avant qu'il ne devienne manchot ! Exploitant également les recoins caverneux de la tanière de l'ogre, véritable charnier de cadavres putrescents ou moribonds, la réalisateur continue de jouer avec nos nerfs de par son sens aiguisé d'une terreur abrupte pour la survie humaine. Une fois encore, si Wolf Creek 2 s'avère aussi tendu, extrême, hargneux et très malsain, il le doit à la maîtrise de sa réalisation, à la photogénie du désert australien (magnifiquement éclairé d'horizons crépusculaires) et à l'interprétation iconique de John Jarratt. L'acteur affichant avec le même enthousiasme goguenard un jeu de dominance entièrement conçu sur le sadisme pervers. 


    Terrifiant, anti ludique et terriblement éprouvant, Wolf Creek 2 ébranle à nouveau le spectateur sans anesthésie et évite l'écueil de la redite à travers un scénario diablotin redoublant d'efficacité pour la condition d'une victime en porte-à-faux. Une séquelle faisant donc honneur à son modèle car toujours opprimante et sans aucune échappatoire, mais beaucoup plus décomplexée à travers sa dérision débridée.  

    Bruno Matéï

    lundi 28 avril 2014

    Les Tueurs de l'Eclipse / Bloody Birthday

                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site avoir-alire.com

    de Ed Hunt. 1981. U.S.A. 1h24. Avec Susan Strasberg, José Ferrer, Lori Lethin, Melinda Cordell, Julie Brown, K.C. Martel, Elisabeth Hoy, Billy Jakoby

    Sortie salles France: 26 Mai 1982

    FILMOGRAPHIE: Ed Hunt est un réalisateur, scénariste et producteur américain, né à Los Angeles.
    1973: Pleasure Palace, 1974: Diary of a Sinner, 1976: Point of no return. 1977: L'Invasion des Soucoupes Volantes. 1979: Plague. 1981: Les Tueurs de l'Eclipse. 1986: Alien Warrior. 1988: The Brain.


    Hit vidéo des années 80 paru sous la bannière d'Hollywood Video, Les Tueurs de l'Eclipse est une savoureuse bande d'exploitation fauchée qui doit son capital sympathie par la succession d'exactions meurtrières commises par de simples bambins. Le Pitch: Trois enfants sans point commun filial naissent le même jour lors d'une éclipse. A l'aube de leur 10 ans, et sans explication plausible, ils provoquent des incidents meurtriers envers les citadins de leur petite bourgade. En reprenant le thème de l'enfant tueur, Ed Hunt ne s'embarrasse ici ni de psychologie, ni de cohérence pour illustrer les méfaits de nos charmantes têtes blondes. Le scénario cumulant sans temps morts les stratégies criminelles qu'ils vont employer pour se débarrasser de leur entourage. Ainsi, de par sa réalisation classique, ses comédiens avenants, voirs parfois cabotins ou inexpressifs (mention à la jeune Lori Lethin dont la bouille s'avère si timorée qu'on ne sait jamais si elle exprime de la gaieté ou de la tristesse lors des épisodes dramatiques !) et ses dialogues élementaires, Les Tueurs de l'Eclipse  aurait pu facilement sombrer dans le navet s'il n'eut été sauvé par le charisme diabolique de ces trois marmots franchement convaincants.


    Si bien qu'avec leur bouille faussement innocente et leur regard étonnemment vicié, le trio s'avère génialement fascinant lorsqu'ils se lancent au défi d'y perpétrer les actes les plus crapuleux. Et donc, en jouant sur l'efficacité de leurs exactions, voire aussi de leur subterfuge afin de discréditer une rivale (la party d'anniversaire), le film insuffle un dynamisme réjouissant en se permettant notamment l'audace d'une violence brutale (coup de pelle, batte de base-ball ou balle reçu en pleine tête, flèche dans l'oeil). D'autant plus que ces bambins s'avèrent très jeunes (ils sont à peine âgés de 10/12 ans) pour commettre de tels actes si bien qu'ils rivalisent de sadisme et d'inventivité pour piéger leurs adversaires (le coup du skate board sur la rampe d'escalier ou celui de la fléchette derrière le trou du placard, l'arme factice échangée contre un vrai dans la ceinture du policier, le jeu du réfrigérateur dans la casse). Outre leur passe-temps favori à exterminer sans remord, ils s'invitent parfois à une partie de voyeurisme derrière le trou d'un placard lors de l'exhibition d'une potiche. Quand au final haletant, Ed Hunt intensifie l'action lors de la séquestration d'une baby-sitter et de son jeune frère communément contraints de se rebeller contre leur autorité anormalement criminelle.


    Bis dans l'âme que les fans savourent à chaque révision, Les Tueurs de l'Eclipse est une farce macabre transcendée de son irrésistible charme bonnard. De par le charisme sardonique du trio de gamins crevant l'écran à chacune de leurs apparitions et la vigueur du rythme fertile en séquences-chocs, ce réjouissant plaisir innocent ne cesse de divertir avec générosité grâce à l'attachante maladresse qu'Ed Hunt met en image avec sincère motivation. Un petit classique en somme n'ayant rien perdu de son efficacité, honorable prétendant pour trôner auprès des meilleurs films d'enfants meurtriers que les années 80 ont su choyer, sans prétention aucune.  

    * Bruno
    5èx

    jeudi 24 avril 2014

    UN TUEUR DANS LA FOULE (Two Minute Warning)

                                                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

    de Larry Peerce. 1976. U.S.A. 1h55. Avec Charlton Heston, John Cassavetes, Martin Balsam, Beau Bridges, Marilyn Hassett, David Janssen, Jack Klugman.

    Sortie salles France: 12 Novembre 1976

    FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Larry Peerce est un réalisateur américain, né le 19 Avril 1930 dans le Bronw, New-York.
    1973: Les Noces de cendre. 1976: Un tueur dans la foule. 1987: Queenie (télé-film). 1989: Wired. 1995: Mensonges et trahison (télé-film). 1999: Abus de confiance.


    En pleine expansion du genre catastrophe, le réalisateur méconnu Larry Peerce exploite le filon pour mettre en scène Un Tueur dans la foule. Le pitch s'avère toujours aussi limpide. Un tueur embusqué sur le toit d'un stade se prépare à commettre un carnage durant la retransmission d'un match de football. Déniché par la police, le capitaine Peter Holly tente de l'appréhender parmi l'ingérence d'une brigade spéciale. Avec sa réunion de stars notoires (Charlton Heston, Gena Rowlands, John Cassavetes, Martin BalsamBeau Bridges), Un Tueur dans la Foule n'échappe pas aux traditionnels clichés pour nous décrire les liaisons houleuses de couples amoureux. Le problème, c'est qu'une fois de plus, ces seconds rôles de faire-valoir s'avèrent dénués d'intérêt pour leur accorder une quelconque empathie face à leur souci d'argent ou d'infidélité. C'est donc du côté des rôles principaux, en particulier celui du capitaine Holly, incarné avec virilité par Charlton Heston, et celui du chef de la brigade spéciale, endossé avec pragmatisme par John Cassavetes, qu'Un Tueur dans la foule réussit à gagner notre enthousiasme. A eux deux, ils forment un tandem plutôt solide pour nous convaincre de leurs stratagèmes à tenter d'alpaguer le tueur.


    Si le début du film démarre en trombe avec l'acte crapuleux d'un homicide, le tueur exterminant lâchement au hasard d'une route un cycliste lambda, la suite peine quelque peu à insuffler de l'attention pour la représentation des seconds-rôles que j'ai précédemment reproché. Qui plus est, dès que le réalisateur pénètre sa caméra en interne du stade pour s'attarder sur le jeu des footballeurs et sur l'étude sportive des commentateurs, l'ennui se fait un peu pesant en attendant les prochains méfaits du tueur. C'est avec l'arrivée musclée de la brigade spéciale qu'Un Tueur dans la Foule peut enfin démarrer et y insuffler une certaine dose de suspense dans la manière dont elle va pouvoir l'appréhender. Le plus important n'est donc pas de savoir quand le tueur va pouvoir frapper et quels innocents seront ciblés, mais plutôt de comprendre de quelle manière la brigade va bien pouvoir accéder au toit du stade afin de le déjouer. Car positionné sur un abri bétonné, en amont de l'affiche des résultats, le meurtrier a trouvé la planque idéale afin de se prémunir des balles et tirer facilement sur ses proies. Une tension sous-jacente nous est donc retransmise avec l'attitude assidue des services de police à daigner grimper sur le toit, quand bien même un spectateur de la foule va lui aussi apercevoir sa fameuse planque à l'aide de ses jumelles ! Bien évidemment, la dernière partie du film, beaucoup plus intense et surtout spectaculaire, emprunte la voie de la catastrophe pour illustrer les exactions du criminel tirant au hasard de la foule ! Outre la violence cinglante assénée sur les innocents, les mouvements de foule en panique s'avèrent aussi impressionnants que réalistes par l'effectif de figurants déployés et leur désespoir d'échapper aux balles ! Quand aux motivations réelles de l'individu en question, le réalisateur préfère les occulter pour laisser sous entendre la folie d'un sociopathe !


    Hormis ses longueurs, ses situations rebattues et sa réalisation routinière, Un Tueur dans la Foule est suffisamment haletant et violemment spectaculaire pour se laisser gagner par son caractère diablement ludique. La présence solide des vétérans Charlton Heston et John Cassavetes ajoutent au charme vintage que le genre catastrophe marque de son empreinte en cette époque florissante des années 70.  

    Bruno Matéï
    3èx

    mercredi 23 avril 2014

    Soldat Bleu (Soldier Blue)

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

    de Ralph Nelson. 1970. U.S.A. 1h55. Avec Candice Bergen, Peter Strauss, Donald Pleasance, John Anderson, Jorge Rivero, Dana Elcar.

    Sortie salles: 23 Avril 1971

    FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Ralph Nelson est un réalisateur américain, né le 12 Août 1916 à New-York, décédé le 21 Décembre 1987 à Santa Monica. 1962: Requiem for a Heavyweight. 1965: Les Tueurs de San Francisco. 1966: La Bataille de la Vallée du Diable. 1968: Charly. 1970: Soldat Bleu. 1972: La Colère de Dieu. 1975: Le Vent de la Violence. 1976: Embryo. 1979: Christmas Lilies of the Field (télé-film).


    Depuis l'aube de l'humanité, l'homme a écrit son histoire dans le sang. Mais il a aussi prouvé que l'étincelle divine existe en lui. Il y a dans l'âme humaine une part d'ombre qui date du jour ou Caïn a tué son frère. La fin du film montre, sans la moindre hypocrisie, les horreurs d'un combat où la folie sanguinaire triomphe de la raison. Les atrocités ne sont pas commises seulement contre l'ennemi, mais aussi contre des innocents, des femmes et des enfants. Horreur suprême: tout cela a bel et bien eu lieu.  

    Western mythique réputé pour sa subversion d'une violence insupportable, Soldat Bleu ébranla une génération de cinéphiles à l'orée des années 70. Si un an au préalable, Sam Peckinpah offrit déjà un coup de fouet au genre par le truchement d'une ultra violence chorégraphiée, Ralph Nelson pousse le bouchon plus loin pour dénoncer l'horreur pure d'un massacre de Cheyennes survenu le 29 Novembre 1864. Ainsi, une unité de cavalerie américaine comptant plus de 700 hommes attaqua un paisible village cheyenne à Sank Creek dans le colorado. Les indiens déployèrent le drapeau américain et un drapeau blanc de reddition. Malgré cela, la cavalerie se lança à l'attaque massacrant 500 indiens dont plus de la moitié étaient des femmes et des enfants. Plus d'une centaine de scalps furent pris, des corps furent démembrés et il y eut de nombreux viols. Le général Nelson A. Miels, chef d'état-major de l'armée, a dit de ce massacre qu'il était peut-être le crime le plus ignoble et le plus injuste de l'histoire des Etats-Unis.


    Ce bref monologue dicté au terme de Soldat Bleu est un rappel de mémoire si bien qu'il nous confirme l'authenticité du génocide indien par l'impérialisme ricain. Segmenté en deux parties bien distinctes, le film s'attache d'abord à nous dépeindre la relation houleuse d'un duo d'amants en discorde. Après une guerre sanglante provoquée par les indiens qui aura valu la mort de 21 soldats de son infanterie, Honus Gent, soldat bleu timoré et naïf, rencontre Cresta Lee, une américaine préalablement kidnappée par un chef indien durant deux ans. Livrés à l'abandon, ils vont tenter ensemble de survivre dans le désert hostile avant d'essayer d'atteindre le fort voisin. Incarnés successivement par Peter Strauss et Candice Bergen, la complicité naturelle qu'ils affichent à l'écran doit beaucoup au caractère pittoresque de leur esprit de divergence. Car ici, le cliché de la blonde potiche est détourné au profit du caractère autoritaire d'une femme impudente, délibérée à avouer au  jeune recrue que son armée est responsable de crimes barbares, d'intolérance et de racisme. On est donc loin ici des clichés du western lyrique cher à John Ford avec les gentils soldats américains combattant les méchants indiens détrousseurs de scalps. Qui plus est, l'utilisation de la partition classique aux accents triomphants nous laisse ici un goût amer dans la bouche de par le réalisme toléré aux affrontements sanglants ! Ainsi, à travers les composantes de comédie et de romance, Ralph Nelson réussit facilement à nous attacher à l'évolution humaine de ces personnages apprenant mutuellement à se connaître car confrontés dans une situation de survie. Face à leur témoignage, c'est avec l'arrivée de la cavalerie que le ton va brusquement virer pour illustrer de façon tranchée la guerre d'une expédition punitive. Ce saisissant contraste imprimé sur les 25 dernières minutes s'avère d'autant plus radical et fortuit au gré d'une intensité dramatique provoquant chez nous colère, dégoût, tristesse et malaise. Ainsi donc, à l'aide d'une violence crue n'hésitant pas à verser dans le gore pour les exactions de décapitations, scalps, démembrements, viols et infanticides, Ralp Nelson nous plonge dans une horreur fétide résolument bouleversante. Si bien que le spectateur endure ce carnage cinglant de manière totalement impuissante face à la folie de l'homme littéralement absorbé par sa dérive sadique ! Des séquences innommables inoubliables qui restent encore aujourd'hui d'une intensité fulgurante au point de nous martyriser l'esprit bien au-delà du générique de fin. 


    Réflexion sur la cruauté de la vengeance, métaphore sur la guerre du Vietnam, réquisitoire contre la haine et la barbarie, Soldat Bleu reste sans nul doute l'un des westerns les plus crus et burnés que le cinéma nous engendra. Et si de prime abord la romance pittoresque nous eut tant séduit et réconforté, l'horreur gratuite qui empiète leur tranquillité ne nous épargnera aucune dérobade. Inoubliable et éprouvant, avec le coeur meurtri. 
    P.S: A réserver à un public averti.

    * Bruno 
    3èx


    mardi 22 avril 2014

    CUJO. Prix du Public, Fantasporto, 1987

                                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site Devildead.com

    de Lewis Teague. 1983. U.S.A. 1h31. Avec Dee Wallace Stone, Danny Pintauro, Daniel Hugh Kelly, Christopher Stone, Ed Lauter, Kaiulani Lee.

    Sortie salles France: 10 Août 1983. U.S: 12 Août 1983

    Récompense: Prix du Public au Festival du film Fantastique de Fantasporto, en 1987.

    FILMOGRAPHIE: Lewis Teague (né le 8 mars 1938 à Brooklyn, New-York, Etats-Unis) est un réalisateur, monteur, acteur et directeur de la photographie américain.
    1974: Dirty O'Neil. 1979: The Lady in red. 1980: L'Incroyable Alligator. 1982: Fighting Back. 1983: Cujo. 1985: Cat's Eye. 1985: Le Diamant du Nil. 1989: Collision Course. 1990: Navy Seals: les meilleurs. 1991: Wedlock.


    D'après le célèbre roman de Stephen King, Cujo est adapté au cinéma en 1983 sous la houlette d'un habile faiseur de série B, Lewis Teague. Succès commercial en salles et en vidéo, ce petit classique de tension horrifique s'avère toujours aussi redoutable 30 ans après sa sortie. A la suite d'une panne d'essence, une mère de famille et son jeune fils se retrouvent piégés à l'intérieur de leur véhicule depuis la menace belliqueuse d'un Saint-Bernard. A partir de cette intrigue linéaire mais originale, Lewis Teague nous confectionne un modèle d'efficacité dans son lot de séquences d'agressions adroitement exécutées. En privilégiant dans sa seconde partie l'unité du huis-clos confinée autour d'une ferme, le réalisateur y implique le désarroi d'une femme et d'un jeune enfant, piégés à l'intérieur d'un environnement encore plus restreint, celui d'une voiture parquée en plein soleil ! Alors que dehors, à quelques mètres d'eux, un Saint-Bernard rendu fou par la morsure d'une chauve-souris attend le moment propice pour passer à l'affront et les alpaguer. Ces tentatives belliqueuses de daigner pénétrer de force dans le véhicule nous vaut des séquences d'agressions extrêmement violentes par son réalisme imposé, alors que les victimes en panique tentent de s'y défendre de manière bien précaire.


    Pour renforcer le malaise et le caractère éprouvant d'un contexte aussi cauchemardesque, le bambin est confronté à ses crises d'asthme lorsque la chaleur d'un soleil écrasant commence à s'y faire sentir en interne du véhicule. Jouant avec le suspense et la tension d'une attaque redoutée, Lewis Teague élabore de main de maître des séquences d'agressions affolantes car sans concession lorsque le chien se projette sur ses victimes. On peut d'ailleurs prôner le jeu authentique du Saint-Bernard, monstre canin au regard torve rempli d'écumes, redoublant de férocité face à la présence humaine ou d'instabilité face à un son trop strident (la sonnerie prolongée d'un téléphone !). On se demande d'ailleurs comment les dresseurs ont pu élaborer des séquences d'attaques aussi cinglantes lors de ses pugilats corporels avec les victimes ! Dominé par la présence de Dee Wallace Stone, l'actrice en état de marasme réussit à retransmettre sa peur viscérale, son désarroi ainsi que sa stoïcité à affronter l'animal pour sauvegarder son bambin. Epatant de naturel dans sa posture de gosse effrayé, Danny Pintauro doit également beaucoup au caractère crédible des altercations sanglantes si bien que l'on s'éprend rapidement de compassion pour sa condition innocente de victime châtiée par le "monstre du placard" !


    Bien que sa première partie s'embarrasse d'une inutile liaison d'adultère mais gagne déjà à susciter la peur lors d'une séquence-choc impressionnante, Cujo doit principalement sa réputation aux 40 dernières minutes, succession d'attaques anthologiques d'une efficacité à la fois optimale et terrifiante. Nanti d'un score percutant, du jeu effarouché des comédiens et d'une virtuosité technique hors pair, ce cauchemar implacable mérite amplement son statut de meilleur film d'agression canine parmi un autre modèle contrairement bouleversant et rationnel, Dressé pour tuer

    Bruno Matéï
    4èx

    lundi 21 avril 2014

    LA MORT AU LARGE (L'Ultimo Squala)

                                                                                         Photo empruntée sur Google, appartenant au site ayay.co.uk

    de Enzo G. Castellari. 1981. Italie. 1h28. Avec James Franciscus, Vic Morrow, Joshua Sinclair, Giancarlo Prete, Micaela Pignatelli.

    FILMOGRAPHIE SELECTIVE: Enzo G. Castellari est un réalisateur, scénariste, acteur, monteur et producteur italien, né le 29 Juillet 1938 à Rome (Italie).
    1967: Je vais, je tire et je reviens. 1968: Django porte sa croix. 1968: 7 Winchester pour un massacre. 1968: Tuez les tous... et revenez seul ! 1973: Le Témoin à abattre. 1976: Keoma. 1977: Une Poignée de salopards. 1977: Action Immédiate. 1979: La Diablesse. 1979: Les Chasseurs de Monstres. 1981: La Mort au Large. 1982: Les Nouveaux Barbares. 1982: Les Guerriers du Bronx. 1983: Les Guerriers du Bronx 2. 1987: Striker. 1987: Hammerhead. 1997: Le Désert de Feu.


    Profitant du filon commercial des 2 premiers opus des Dents de la mer, Enzo G. Castellari nous rend ici sa copie Z dans la pure tradition du Bis transalpin. Reprenant le même schéma narratif que ces modèles, La Mort au Large illustre à nouveau les vicissitudes de touristes d'une station balnéaire, pris à parti avec un dangereux requin ! Et pas des moindres, puisqu'aux dires du chasseur Ron Hamer, il s'agirait du plus gros poisson jamais aperçu durant toute sa carrière. Lui et l'écrivain Peter Brenton décident d'entreprendre une traque en mer afin d'éradiquer l'animal et depuis que le maire a refusé l'annulation des festivités d'un concours de voiliers !


    Avec ses personnages ultra caricaturaux blablatant leurs répliques impayables dans une posture contractée, ses situations rebattues et son budget dérisoire, la Mort au large ne peut compter que sur l'efficacité du montage et de l'action récurrente pour stimuler le divertissement. Afin d'alpaguer le requin, c'est donc sur les stratégies de quelques protagonistes que le réalisateur compte focaliser son intrigue en l'émaillant de morts spectaculaires. De manière autonome, ils vont donc parcourir la mer à bord de leur bateau, quand bien même le maire de la ville décide de le traquer en hélicoptère ! Ce qui nous vaut un bel effet gore assez spectaculaire et plutôt efficace dans son effet minimaliste (suspendu dans le vide car agrippé au patin de l'hélicoptère, l'homme se fera arracher les jambes par la mâchoire du squale !). Du côté des médias, un journaliste véreux au plus près de l'affaire profite également de l'évènement pour s'attirer la notoriété et en soudoyant un chasseur de requin un peu trop zélé (là encore, l'agression du requin laisse en exergue une mort grand-guignolesque du plus bel effet !). Afin de pallier ses moyens dérisoires, Enzo G. Castellari utilise notamment le stock-shot traditionnel pour substituer les rares apparitions du faux requin, mais aussi la maquette pour certaines séquences aquatiques (comme celle du crash de l'hélicoptère ou lors du final explosif).


    Avec l'attachante bonhomie de comédiens de seconde zone au charisme viril (James Franciscus / Vic Morrow) et la fantaisie involontaire de situations de panique, La Mort au Large joue la carte de l'exploitation sous un format modeste de série B. A l'instar du savoir-faire rudimentaire de son auteur mais tout à fait appliqué à rendre une copie Z des plus divertissantes. Ajouter à cela un score entêtant suscitant la menace et vous obtenez la déclinaison la plus ludique de Jaws. Un nanar aujourd'hui notoire qui aura d'ailleurs fait de l'ombre au futur projet des Dents de la mer 3 puisque ayant dépassé ses recettes commerciales en terme d'entrées ! 

    Bruno Matéï
    4èx


    vendredi 18 avril 2014

    BRAINDEAD (Dead Alive). Grand Prix à Avoriaz, 1993.

                                                                     Photo empruntée sur Google, appartenant au site kraders.wordpress.com

    de Peter Jackson. 1992. 1h44. Nouvelle Zélande. Avec Timothy Balme, Diana Penalver, Elizabeth Moody, Ian Watkin, Brenda Kendall.

    Sortie salles France: 27 Avril 1993

    FILMOGRAPHIE: Sir Peter Robert Jackson est un réalisateur, producteur et scénarise néo-zélandais, né le 31 Octobre 1961 à Pukerua Bay, North Island (Nouvelle-Zélande).
    1987: Bad Taste. 1989: Les Feebles. 1992: Braindead. 1994: Créatures Célestes. 1995: Forgotten Silver. 1996: Fantômes contre fantômes. 2001: Le Seigneur des Anneaux. 2002: Les Deux Tours. 2003: Le Retour du Roi. 2005: King-Kong. 2009: Lovely Bones. 2012: Le Hobbit: un voyage inattendu. 2013: Le Hobbit: la Désolation de Smaug. 2014: Le Hobbit: Histoire d'un aller et retour.


    Réputé comme le film le plus gore de tous les temps, Braindead se complaît toujours plus dans l'absurdité avec une fougue et un sens de l'invention débridés ! Après avoir été contaminée par un singe mutant ramené d'Indonésie, la mère de Lionel se transforme peu à peu en zombie et finit par transmettre son virus à d'autres habitants de la région. Souhaitant préserver sa vie, Lionel la planque à l'intérieur de sa cave parmi trois autres macchabées. Mais l'arrivée désinvolte de son oncle et d'une ribambelle d'invités vont semer la zizanie dans la maison quand ils vont tenter de se défendre contre ces zombies dopés aux stimulants ! Puisant son inspiration dans les comédies burlesques du temps du muet (celles de Buster KeatonLaurel et Hardy ou encore Charlie Chaplin pour la romance impartie au couple de héros) et des bobines trash déjantées des eighties (Evil-dead, Ré-animator, Street Trash, Frères de Sang, etc), Peter Jackson nous concocte un film hardgore nonsensique et semble avoir été dopé aux amphétamines pour nous avoir conçu autant de situations incongrues (le repas du pudding entre invités chez la mère de Lionel, le couple de zombies en coït procréant un mort-né vivant, la balade en poussette de ce dernier dans le parc familier, le pasteur expert en karaté pour démembrer les zombies du cimetière !). 


    Récompensé du dernier Grand Prix à Avoriaz en 1993, Braindead peut se targuer d'être le mastodonte du gore décomplexé où rire et action se disputent sans relâche. L'incroyable énergie qui se dégage de la mise en scène de Jackson (abus de cadrages obliques et de zooms grossiers afin d'accentuer son caractère grand-guignolesque !), l'extravagance des personnages erratiques et l'horreur déployée à grands renforts d'hectolitres de sang nous plongent dans un carnaval horrifique toujours plus frénétique. A l'instar de ces 35 dernières minutes, anthologie du carnage vomitif contrebalancé par une dérision aussi morbide que pittoresque. Sur ce point, comment oublier le massacre commis à la tondeuse à gazon que Lionel exécute avec une démesure infernale ! Et si aujourd'hui Braindead n'a rien perdu de sa vitalité dans son pouvoir récréatif, c'est notamment grâce à l'habileté d'effets-spéciaux artisanaux bluffants de réalisme ! Certaines séquences compilées en temps réel s'avèrent d'ailleurs si impressionnantes qu'on se demande comment les techniciens ont pu réussir à entreprendre de tels prodiges dans leur souci du détail gore !


    Le chant du cygne du gore à l'ancienne
    Jouissivement gore et délirant par son esprit cartoonesque, Braindead est le grand huit d'une horreur ricanante culminant son apogée dans une dernière orgie apocalyptique ! Le redécouvrir 20 ans après sa sortie prouve à quel point la mise en scène virtuose de l'insatiable Jackson était en avance sur son temps et que l'ère du numérique n'a pas encore surpassé cette bacchanale de tous les excès ! 

    Bruno Matéï
    3èx

    RécompensesGrand prix, Prix des Effets Spéciaux, Prix de la Critique au Festival du film fantastique d'Avoriaz 1993 
    Meilleurs effets spéciaux au Festival international du film de Catalogne en 1992.
    Silver Scream Award au Festival du film fantastique d'Amsterdam 1993.
    Meilleur film et meilleurs effets spéciaux à Fantasporto, 1993.
    Meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur acteur (Timothy Balme) et meilleur scénario aux New Zealand Film and TV Awards en 1993.


    jeudi 17 avril 2014

    Le Silence des Agneaux / The Silence of the Lambs. Oscar du Meilleur Film, 1992

                                                          Photo empruntée sur Google, appartenant au site sites.psu.edu

    de Jonathan Demme. 1991. U.S.A. 1h58. Avec Jodie Foster, Anthony Hopkins, Scott Glenn, Ted Levine, Anthony Heald, Diane Baker, Kasi Lemmons, Brooke Smith.

    Sortie salles France: 10 Avril 1991. U.S: 30 Janvier 1991

    FILMOGRAPHIE: Jonathan Demme est un réalisateur, producteur et scénariste américain, né le 22 Février 1944 à Long Island. 1974: 5 Femmes à abattre. 1975: Crazy Mama. 1976: Fighting Mad. 1977: Handle with Care. 1979: Meurtres en cascade. 1980: Melvin and Howard. 1984: Swing Shift. 1984: Stop Making Sense. 1986: Dangereuse sous tous rapports. 1987: Swimming to Cambodia. 1988: Famous all over Town. 1988: Veuve mais pas trop. 1991: Le Silence des Agneaux. 1992: Cousin Bobby. 1993: Philadelphia. 1995: Murder Incorporated. 1998: Beloved. 2002: La Vérité sur Charlie. 2004: Un Crime dans la Tête. 2008: Rachel se marie.


    Grand classique du thriller moderne au même titre que son homologue Seven, Le Silence des Agneaux remporta tous les suffrages auprès de la critique et du public grâce en priorité à la rigueur d'un scénario charpenté et à une confrontation psychologique en acmé. Couronné de 5 oscars dont celui du meilleur film, Le Silence des Agneaux doit autant sa renommée grâce au duo improbable formé par Jodie Foster et Anthony Hopkins. Si bien qu'une agent du FBI doit collaborer avec un dangereux tueur en série pour tenter d'en appréhender un autre lâché en pleine nature. Cet entretien psychologique qu'amorce Clarice Starling avec le Dr Hannibal Lecter laisse en exergue des confrontations d'une grande intensité émotionnelle si bien que cet anthropophage se joue malin plaisir à fouiller dans l'esprit torturé de la jeune inspectrice. En échange de précieuses informations afin de localiser le tueur Buffalo Bill (Ted Levine est également effrayant en tueur androgyne frustré par sa sexualité !), Clarice est donc contrainte de lui divulguer un traumatisant secret antérieur. Celui d'avoir été témoin d'hurlements d'agneaux abattus sous ses yeux lorsqu'elle fut enfant. Depuis, ces nuits sont régulièrement hantées par ces plaintes moribondes, et donc le fait de tenter de retrouver vivante la dernière victime du tueur pourrait peut-être lui permettre de mettre un terme à ces cauchemars nocturnes. 


    Ainsi, leur relation psychologique fondée sur la psychanalyse et la requête d'informations capitales finit donc par les rapprocher dans une confiance mutuelle teintée d'affection. C'est la une des grandes originalités du récit permettant d'entretenir un rapport équivoque entre l'intégrité d'une inspectrice audacieuse et la manipulation d'un éminent psychiatre d'une intelligence singulière mais tributaire de ses démons. Dominé par la performance glaçante d'Anthony Hopkins (sa 1ère apparition reste dans toutes les mémoires !), l'acteur se fond dans la peau du serial-killer de manière magnétique de par sa posture monolithique rehaussée d'un regard impassible figé dans le vide. Il en émane une aura malsaine insaisissable par son esprit de persuasion et sa démence anthropophage ! Avec fragilité humaine, Jodie Foster incarne une inspectrice en herbe perspicace et pugnace, à l'instar de son franchissement au repère de Buffalo Bill (ce qui nous vaut un final terrifiant bâti sur la peur du noir !). En alternance, elle nous insuffle également une émotion anxiogène éprouvante lorsqu'elle se laisse gagner par des souvenirs douloureux (la mort brutale de son père, la terreur des agneaux sur le point de trépasser) et lorsqu'elle doit faire face à sa survie de manière autonome (son fameux face à face avec Buffalo). 


    "La plus grande révélation est le silence" 
    A la fois bouleversant, tendu et terrifiant, éprouvant, malsain et perturbant à travers sa mise en scène sobrement documentée, Le Silence des Agneaux puise sa force dans sa dimension dramatique, dans l'intelligence du scénario ramifié et dans le pouvoir de suggestion imparti à la psychanalyse et à sa scénographie morbide (notamment cette découverte d'un corps putrescent dans la morgue où l'on extrait de sa bouche un cocon d'insecte). Enfin, l'oeuvre génialement vénéneuse n'aurait peut-être pas gagné son galon de pur chef-d'oeuvre sans la complicité incongrue du duo Starling/Lecter à marquer d'une pierre blanche. Un couple sulfureux bâti sur le rapport d'influence et de considération que Jodie Foster et Anthony Hopkins retransmettent avec une ambivalence infiniment trouble. Et ce jusqu'à sa conclusion irrésolue à l'aura de souffre et au pouvoir émotionnel terriblement déstabilisants. Du grand art pour le genre avec l'étrange impression de découvrir une oeuvre mutante à chaque révision (il faut d'ailleurs privilégier la VO pour son attrait vériste à la limite du reportage).   

    *Bruno
    04.01.23. 5èx

    Récompenses: Oscar 1992 du Meilleur Film, Oscar du Meilleur Acteur (Anthony Hopkins), Oscar de la Meilleure Actrice (Jodie Foster), Oscar du Meilleur Réalisateur (Jonathan Demme), Oscar du Meilleur Scénario: Ted Tally.
    Prix Edgar-Allan-Poe du Meilleur Scénario, Ted Tally

      mercredi 16 avril 2014

      SEVEN

                                                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

      de David Fincher. 1995. U.S.A. 2h07. Avec Brad Pitt, Morgan Freeman, Kevin Spacey, Gwyneth Paltrow, R. Lee Ermey, Richard Roundtree, John C. McGinley.

      Sortie salles France: 31 Janvier 1996. U.S: 22 Septembre 1995

      FILMOGRAPHIE: David Fincher est un réalisateur et producteur américain, né le 28 Août 1962 à Denver (Colorado). 1992: Alien 3. 1995: Seven. 1997: The Game. 1999: Fight Club. 2002: Panic Room. 2007: Zodiac. 2008: L'Etrange histoire de Benjamin Button. 2010: The Social Network. 2011: Millénium. 2014: Gone Girl.


      Ernest Hemingway a écrit: "le monde est beau et vaut qu'on se batte pour lui". 
      La seconde partie, je suis d'accord.

      Référence absolue du genre (avec son acolyte le Silence des Agneaux), Seven fut autant un succès commercial que critique lors de sa sortie. Le revoir aujourd'hui prouve à quel point David Fincher a entrepris avec son 2è long-métrage une oeuvre proche de la perfection, à l'instar du travail méthodique accompli par John Doe, un tueur inspiré des 7 pêchers capitaux. A sept jours de la retraite, l'inspecteur Somerset est contraint de résoudre une affaire criminelle particulièrement difficile avec l'aide du jeune recru, David Mills. Ensemble, ils vont tenter de mettre la main sur l'un des tueurs les plus retors et machiavéliques ayant comme seul ambition de parfaire son chef-d'oeuvre ! Thriller morbide d'une noirceur nihiliste, Seven réexploite l'investigation criminelle et la traque au serial-killer avec un goût prononcé pour l'amertume. De par l'aigreur d'un flicard sclérosé, fatigué d'avoir eu à régler des affaires sordides dans un monde gangrené par le pêcher, et par l'éthique amorale d'un criminel studieux entièrement soumis à l'autorité de Dieu. Avec son climat pluvieux inscrit dans la morosité, David Fincher annonce la couleur blafarde d'une cité urbaine entièrement soumise à l'arrogance du tueur auquel deux inspecteurs sur le qui-vive redoubleront d'effort afin de déjouer son prochain homicide. Sans jamais verser dans une quelconque complaisance, Fincher joue la carte de la suggestion car nous ne verrons jamais de quelle manière explicite le tueur accomplit ses exactions.


      C'est dans la résultante du crime et dans la version des faits exposés que Seven laisse gambader notre imaginaire vers un abîme d'ignominies. Que ce soit le châtiment invoqué à la gourmandise (l'obèse mort étouffé par sa propre bouffe !), à la paresse (la lente agonie d'un drogué avachi sur son lit durant 365 jours !), à l'orgueil (le visage d'une jolie femme lacérée au couteau) ou à la luxure (le jeu sexuel du godemiché perforant !), les tortures infligées sur chacune des victimes nous sont remémorées avec force et détails par les témoins, médecins ou complices éventuels (tel celui contraint de collaborer au pêcher de la luxure !). Sans compter sur la sagacité de notre duo d'inspecteurs ! Outre la rigueur géométrique d'une mise en scène virtuose (la poursuite impromptue dans l'immeuble du tueur culminant vers le centre urbain), David Fincher élabore une montée en puissance du suspense qui atteindra son apogée lors d'un final apocalyptique. La tension graduelle dont John Doe sait faire preuve pour intimider les inspecteurs lors de son escorte en véhicule redouble d'acuité lorsque ce dernier osera leur avouer ses deux plus beaux méfaits. Cette dernière partie anthologique distille un tel climat de malaise si bien que le Mal en personne semble y être le principal instigateur. On peut d'ailleurs établir une filiation avec l'aura malsaine d'une entité maléfique qui imprégnait la pellicule de Friedkin dans le fameux Exorciste, notamment cette analogie entre l'inspecteur Somerset et le père Damien Karras puisque tous deux gagnés par une non-croyance ! Qui plus est, le tueur venu de nulle part (John Doe est une fausse identité !) souhaite y laisser son empreinte et transmettre son rituel biblique à tous les dégénérés de la terre !


      "La peur mène à la colère, la colère mène à la haine, la haine mène à la souffrance"
      Chef-d'oeuvre de suspense et de tension dévoilant un regard sinistré sur la nature humaine, Seven demeure notamment un fabuleux numéro d'acteurs que Kevin Spacey monopolise avec autant de tranquillité apathique que de cynisme impassible ! Vertigineux jusqu'au malaise viscéral !

      Bruno Matéï
      3èx

      Récompenses:
      Meilleur film et meilleur scénario au festival Fantasporto,1996.
      Saturn Awards du meilleur scénario et du meilleur maquillage en 1996.
      MTV Movie Awards du meilleur film et du meilleur méchant (Kevin Spacey) en 1996.
      Hochi Film Award du meilleur film étranger en 1996.
      Empire Awards du meilleur film et du meilleur acteur (Morgan Freeman) en 1997.
      Prix du public du meilleur film étranger aux prix Sant Jordi du cinéma en 1997.
      Blue Ribbon Award du meilleur film étranger en 1996.

      mardi 15 avril 2014

      LAST DAYS OF SUMMER (Labor Day)

                                                                                      Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com

      de Jason Reitman. U.S.A. 1h51. Avec Kate Winslet, Josh Brolin, Gattlin Griffith, Tobey Maguire, James Van Der Beek, Clark Gregg, Brooke Smith.

      Sortie salles France: 30 Avril 2014. U.S: 31 Janvier 2014

      FILMOGRAPHIE: Jason Reitman est un réalisateur, producteur et scénariste canadien, né le 19 Octobre 1977 à Montréal.
      2005: Thank You for Smoking. 2007: Juno. 2009: In the Air. 2011: Young Adult. 2013: Last days of Summer


      Cinéaste canadien révélé par Juno, In the Air et Young Adult, Jason Reitman n'en finit plus de nous surprendre avec son cinquième long-métrage adapté d'un best-seller de Joyce Maynard.
      Romance éperdue à la sensibilité prude, de par l'humanisme chétif de ses personnages, Last Days of summer relate la destinée amoureuse d'un couple en berne condamné à l'expectative. L'histoire d'amour impossible entre un évadé de prison et une jeune femme timorée, vivant recluse dans sa demeure parmi l'attention de son jeune fils. De prime abord, Jason Reitman s'attache à retranscrire la tendre relation qui unit cette mère et son enfant quand le père a démissionné de ses fonctions pour entreprendre une existence plus conforme à ses espérances. Taciturne et introvertie, car perturbée par un lourd passé, Adele ne croit plus en l'amour depuis son divorce jusqu'au jour où un étranger quelque peu menaçant décide de séjourner dans son foyer afin de fuir la police. Au fil leurs entretiens journaliers, Adele et le jeune Henry vont peu à peu se laisser attendrir par la bienséance de l'individu prodiguant confiance et respect d'autrui. Également tributaire d'un grave passé au secret inavouable, ce dernier finit par s'identifier à la fragilité sentencieuse de la jeune femme au point d'en tomber amoureux. De son côté, l'adolescent délaissé de sa mère commence à s'interroger sur les réelles motivations de l'inconnu, quand bien même sa mauvaise fréquentation avec une jeune adolescente va prolonger sa remise en question.


      Avec sa mise en scène épurée éludée de fioriture, Jason Reitman filme cette romance élégiaque de manière gracile, à l'image de cette nature bucolique qui environne nos héros. Outre la densité des enjeux incertains, l'intensité du récit émane surtout de la sincérité des comédiens que le cinéaste filme avec maturité et refus de sentimentalisme. La manière limpide à laquelle il nous conte son histoire dédiée aux tourments nous implique dans une émotion vulnérable qu'un suspense exponentiel va venir renforcer dans sa toute dernière partie. Sans chercher à manipuler gratuitement les mécanismes de la tension, Jason Reitman exacerbe en point d'orgue un dénouement des plus précaires dans son mode du thriller et sublime au passage une profonde histoire d'amour. En abordant les thèmes de la famille, de l'infidélité, de la démission parentale, SPOILER ! de l'erreur judiciaire, du deuil infantile FIN DU SPOILER et du fragile passage à l'adolescence, Last Days of summer traite ses réflexions à travers l'affliction d'amants désavoués d'un lourd passé SPOILER ! mais auquel la patience finira par vaincre leur déveine FIN DU SPOILER. Du point de vue de la puberté, le personnage d'Henry observe cette nouvelle relation avec inquiétude et interrogation, avant de comprendre les sens de l'amitié et de l'équilibre familial bâtis sur la confiance, le respect, la tolérance et l'amour.


      "Il faut une infinie patience pour attendre toujours ce qui n'arrive jamais". 
      Admirablement dirigé et servi par un trio de comédiens d'une dignité humaine bouleversante, Last Days of summer rejette la sinistrose afin de renouer avec l'épopée romanesque et démontre que le sentiment amoureux reste l'élément le plus aléatoire et cathartique de notre destinée. A vos mouchoirs mesdames !

      Bruno Matéï