jeudi 31 août 2017

IT COMES AT NIGHT

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site uae.voxcinemas.com

de Trey Edward Shults. 2017. U.S.A. 1h38. Avec Joel Edgerton, Christopher Abbott, Carmen Ejogo, Kelvin Harrison Jr., Riley Keough

Sortie salles France: 21 Juin 2017. U.S: 9 Juin 2017

FILMOGRAPHIETrey Edward Shults est un réalisateur, scénariste et producteur américain né en 1988 à Houston, aux États-Unis. 2016 : Krisha. 2017 : It Comes at Night.


Vendu comme un film d'horreur alors qu'il s'agit à mon sens d'un authentique drame psychologique, It coms at night divisera assurément le public. Car outre l'aspect plutôt fallacieux de son marketting, cette oeuvre modeste pâtie d'un rythme latent il faut avouer, d'un climat austère pesant et de personnages (volontairement) peu attachants dans leur démarche solitaire aussi bien parano qu'équivoque. Au fin fond d'une forêt, un couple est leur fils sont retranchés dans leur cabane afin de se préserver d'une grave pandémie. Une nuit, un inconnu tente de forcer leur entrée car suspectant la maison vide d'habitants. Après un compromis et en guise de confiance, Paul décide de prêter main forte à celui-ci en allant chercher sa femme et son fils à quelques kilomètres de là. De retour au bercail, les deux couples tentent de survivre à l'intérieur du foyer sous certaines conditions drastiques. Principalement celle de ne jamais sortir la nuit... Déroutant et monotone, It comes at night sollicite un effort considérable auprès du spectateur impliqué dans une situation de survie chargée de non-dits au sein d'une banalité quotidienne à la fois anxiogène et déprimante.


Peu ludique donc quant à son cheminement routinier dénué de surprise (ou alors si peu si je me réfère à la fugue du chien), It comes at night insuffle une étrange atmosphère de silence ouaté et d'angoisse sous-jacente au coeur d'une forêt mutique. Quand bien même la nuit est l'objet de toutes les contrariétés chez nos occupants lorsque le moindre bruit y résonne de l'extérieur de la porte de sortie (la seule issue de secours pour s'échapper de la bâtisse !). On se demande dès lors où Trey Shults souhaite nous mener à travers son huis-clos principalement centré sur les thèmes de la dynamique de groupe, de l'épidémie virale et de la mysophobie (crainte exagérée de la contamination) ! Louablement, et par le biais d'un rebondissement aussi retors qu'inopiné, la dernière partie, cruelle et intensément tragique crève l'abcès afin de dénoncer les conséquences de la panique chez l'homme confronté à une situation de crise sanitaire au sein de la cellule familiale. Le réalisateur prenant soin d'y dénoncer par le biais de cet évènement notre égoïsme et notre lâcheté face à la crainte viscérale du virus mortel. Dur et sans concession de par sa grande violence aussi bien gratuite que dérisoire, ce point d'orgue morbide nous suscite un amère sentiment d'amertume d'autant plus poignant lorsque l'homme de prime abord solidaire et empathique auprès de son prochain finit par succomber à ses pulsions d'auto-défense lors d'une situation parano découlant sur la méfiance ! Seul compte alors l'esprit d'individualité avec comme conséquence désastreuse un déchaînement de haine et de violence !


Déconcertant à plus d'un titre par son atmosphère hermétique de déréliction et son suspense sous-jacent retardant au possible son dénouement renversant, It comes at night risque de perdre en route une partie du public quand bien même d'autres plus réceptifs et patients ne resteront pas insensibles à son intensité dramatique finalement démoralisante au travers d'une réflexion sur l'instinct de survie que l'homme amorce individuellement. Difficile de sortir indemne d'une telle déroute...

Bruno Dussart

mercredi 30 août 2017

LA MARQUE

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site filmaffinity.com

"Quatermass 2" de Val Guest. 1957. U.S.A. 1h22. Avec Brian Donlevy, John Longdon, Sydney James, Bryan Forbes, William Franklyn, Vera Day.

Sortie salles Angleterre: 17 Juin 1957. U.S: Septembre 1957.

FILMOGRAPHIE PARTIELLE: Val Guest de son vrai nom Valmond Guest est un scénariste, réalisateur et producteur britannique né le 11 décembre 1911 à Londres (Royaume-Uni) et décédé le 10 mai 2006 à Palm Springs (Californie). 1954 : La Revanche de Robin des Bois. 1955 : Le Démon de la danse. 1955 : Le Monstre. 1956 : It's A Wonderful World. 1957 : Scotland Yard appelle FBI. 1957 : La Marque. 1957 : Le Redoutable Homme des neiges. 1960 : Expresso Bongo. 1961 : Traitement de choc. 1961 : Le Jour où la Terre prit feu. 1967 : Casino Royale. 1970 : Toomorrow. 1970 : Quand les dinosaures dominaient le monde. 1982 : The Boys in Blue (en). 1984 : Mark of the Devil (en) (TV). 1984 : In Possession (TV). 1985 : Child's Play (TV).


Second volet de la trilogie Quatermass toujours réalisé par Val Guest, La Marque transcende son modèle grâce en priorité à l'ossature d'un suspense exponentiel ne laissant que peu de répit aux protagonistes jouant les investigateurs de la dernière chance afin d'enrayer une autre menace extra-terrestre. Fort original, même si sans doute influencé par l'Invasion des profanateurs de sépultures sorti un an plus tôt, l'intrigue se focalise sur la quête désespérée de Quatermass et ses deux complices (un policier et un journaliste) redoublants de risques et vigilance pour déjouer un complot de grande envergure, puis d'en avertir la population locale du danger létal de météroïtes provenant probablement d'une usine d'expérimentation. Ces pierres bourrées de gaz d'ammoniac étant capables d'infecter leurs victimes d'une marque sur le visage après que ces derniers l'eurent approchés. Classée top secret, l'industrie contrôlée par des militaires armés, affublés de masque à gaz, serait selon son entrepreneur une fabrique de nourriture synthétique. Beaucoup plus captivant et intense que le Monstre (mais pour autant moins effrayant), La Marque fascine incessamment sous l'impulsion fébrile de protagonistes à bout de souffle tentant d'enrayer une menace à la fois délétère et sournoise. Celle d'une marque en forme de V que les victimes lobotomisées subissent après explosion d'un gaz, quand bien même ce combustible découlait d'une créature disproportionnée confinée sous un dôme car en attente de parfaire son dessein meurtrier.


Baignant dans un climat parano et de mystère palpables (les indices nous sont dévoilés au compte goutte !), La Marque s'érige autour d'une enquête policière d'autant plus subtile car relativement chiche en surenchère horrifique. Val Guest, s'efforçant de crédibiliser son contexte alarmiste par le biais d'une mise en scène aussi avisée que celle du Monstre et par le truchement d'idées singulières jamais grand-guignolesques ! (même les apparitions finales des créatures impressionnent et révulsent à la fois par leur aspect organique comparables à un géant conteneur de déchets toxiques !). Pour autant, les quelques scènes chocs qui empiètent le récit font preuve d'audace pour l'époque si bien qu'elles continuent encore aujourd'hui de nous impressionner. A l'instar d'une victime moribonde recouverte d'une sorte de goudron toxique sur le corps et finissant par agonir sous notre témoignage impuissant ! Impeccablement mené donc et truffé de rebondissements toujours plus homériques (la dernière partie cumule les confrontations musclées entre militaires et rebelles alors que quelques incidents meurtriers s'avèrent d'une cruelle radicalité !), la Marque témoigne d'une solide distribution (Brian Donlevy s'avère encore plus impliqué et martial que dans le précédent volet !) et ce jusqu'aux moindres seconds rôles (le charismatique John Longden en policier difficilement domptable et Sydney James en journaliste aviné inconsciemment suicidaire !).


Passionnant, intense et fascinant au rythme d'une partition haletante de James Bernard (un abonné de l'écurie Hammer !), La Marque met les bouchées doubles pour transcender son modèle parmi le brio de Val Guest pétri d'ambition à parfaire (sans fard) une invasion extra-terrestre nouvellement singulière. Marquant de son empreinte ce second chef-d'oeuvre crépusculaire (photo picturale à l'appui !), on pourra ensuite compter sur le talent de Roy Ward Barker à boucler un ultime volet (colorisé) encore plus perfectionniste (et spéculatif) que ses congénères !

Eric Binford
3èx

mardi 29 août 2017

BUSHWICK

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemamontreal.com

de Jonathan Milott et Cary Murnion. 2017. U.S.A. 1h34. Avec Dave Bautista, Brittany Snow, Angelic Zambrana, Jeff Lima, Paco Lozano, Christian Navarro.

Sortie France uniquement en VOD. U.S: 25 août 2017 (sortie limitée en salles et VOD)

FILMOGRAPHIE: Jonathan Milott est un réalisateur américain. 2014: Cooties. 2017: Bushwick
Cary Murnion est un réalisateur, scénariste et producteur américain. 2008: Jay vs Life (TV Movie). 2014: Cooties. 2017: Bushwick.


Dtv distribué par Netflix, Bushwick est la seconde réalisation du duo Jonathan Milott / Cary Murnion préalablement responsable d'une comédie horrifique, Cooties. Film d'action belliciste sur fond de crise politico-sociale, Bushwick (quartier de Brooklyn) relate le parcours de survie de Lucy prise à parti avec des tirs militaires et civils au sein de sa cité réduite à feu et à sang. Durant sa fuite, et après avoir échappée au viol par deux délinquants, elle est secourue par un mastard, Stupe, ancien infirmier ayant servi plus tôt dans la marine en Irak. Ensemble, ils tentent de regagner le foyer de la grand-mère de Lucy tout en essayant de saisir les tenants et aboutissants de l'insurrection urbaine livrée à l'auto-justice. Et ce en dépit de la potentielle loi martial soudainement décrétée pour un motif que l'on ne connaîtra qu'à mi-parcours de l'action. Filmé en temps réel sous le principe souvent subjectif, Bushwick joue la carte du divertissement belliqueux avec le parti-pris de privilégier/respecter le spectateur adulte au détriment de l'ado féru d'actionner bourrin. Dans une ambiance cauchemardesque particulièrement réaliste, les auteurs parviennent à nous immerger dans l'intensité de l'action sans jamais céder à une vaine esbroufe si bien que les divers déplacements de nos héros (faits de "chair et de sang", j'insiste !) nous paraissent crédibles quant à leurs efforts de survie à se dépêtrer des balles ennemies avec un humanisme poignant.


Nanti d'un score électro incisif et d'une mise en scène étonnamment maîtrisée (notamment au travers de plans séquences vertigineux ou lors de saisissants panoramas faisant office de fresque d'apocalypse !), Bushwick possède un style formel pas très éloigné du cinéma de John Carpenter (format scope en sus !). Notamment si je me réfère au charisme sans fard de vraies gueules d'acteurs qu'on ne retrouve plus (ou alors si peu) dans le cinéma d'action mainstream si lisse car trop conventionnel. Dave Bautista (très impressionnant de carrure trapue !) et Brittany Snow se partageant mutuellement la vedette avec autant de fragilité démunie (notamment cette superbe séquence finale où Stupe se confie sans complexe à elle sur son passé tragique) que de pugnacité couillue (l'un et l'autre vont apprendre à s'épauler durant leur traque et isolement et ainsi canaliser leur peur lors d'un héroïsme abrupte au risque de céder à des pulsions meurtrières punitives). Car il faut les voir accourir, faire profil bas dans les rues de Brooklyn pour tenter d'esquiver les balles provenant autant du haut des toitures que du bitume engorgé de carcasses de voitures incendiées ! De surcroît, le sentiment d'insécurité permanent et de danger létal émanent notamment de l'incapacité pour nos héros à pouvoir distinguer quel ennemi ils doivent combattre lorsque civils et militaires s'entretuent sans aucune morale avant d'y connaître l'instigateur ! (une révélation d'ordre politique faisant froid dans le dos !).


Solidement réalisé et interprété sous le pilier d'une intrigue ombrageuse évoquant le spectre de la guerre civile par le biais d'une dissidence politique, Bushwick parvient à faire naître l'appréhension en nous immergeant tête baissée dans un contexte réaliste de sédition plausiblement prémonitoire. En prime de l'efficacité des péripéties homériques et embûches insidieuses par le biais de rencontres impromptues, Bushwick oppose de poignantes intimités psychologiques avant de se clore (et donc pour mieux nous ébranler de sa déliquescence sociale !) sur le pessimisme d'une conclusion aussi radicale qu'effrayante ! Une bonne surprise d'une brûlante actualité métaphorique. 

Dédicace à Jean-Marc Micciche
Bruno Matéï

lundi 28 août 2017

Vampires vous avez dits vampires 2 / Fright Night 2

                                                    Photo empruntée sur Google, appartenant au site Imdb.com

"Fright Night Part 2" de Tommy Lee Wallace. 1988. 1h44. Avec William Ragsdale, Roddy McDowall, Traci Lind, Julie Carmen, Jon Gries, Russell Clark, Brian Thompson.

Sortie salles France: 11 Janvier 1989. U.S: 19 Mai 1989

FILMOGRAPHIE: Tommy Lee Wallace (né le 06/09/1949) est un réalisateur, producteur, chef accessoiriste, monteur, chef décorateur et scénariste américain. 1982 : Halloween 3 : Le Sang du sorcier. 1988 : Aloha Summer. 1988 : Vampire, vous avez dit vampire 2 ? 1990 : Ça (It) (TV). 1991 : And the Sea Will Tell (TV). 1992 : The Comrades of Summer (TV). 1992 : Danger Island (en) (TV)
1994 : Witness to the Execution (TV). 1994 : Green Dolphin Beat (TV). 1996 : Born Free: A New Adventure (TV). 1996 : Alliance interdite (TV). 1997 : Steel Chariots (TV). 1998 : Une voleuse de charme (TV). 1998 : L'Ultime Verdict (TV). 2002 : Vampires 2 : Adieu vampires. 2010 : Helliversity


Trois ans après l'excellent premier volet devenu culte depuis chez la génération 80, c'est à Tommy Lee Wallace (cinéaste entre autre du génial Halloween 3 et du sympathique télé-film Ca !) qu'incombe la délicate tâche d'élaborer une séquelle sous l'égide des deux illustres acteurs William Ragsdale (le jeune héros du 1er film toujours aussi impliqué dans son investigation occulte) et Roddy McDowall reprenant son rôle de Peter Vincent avec une exubérance toujours aussi gentiment folingue. Quelques années après les sombres évènements surnaturels, Charlie suit une thérapie si bien qu'il ne croit plus aux vampires. Mais l'arrivée de nouveaux voisins vont le remettre en question avant de recontacter le tueur de vampires, Peter Vincent. Reprenant à peu de choses près le schéma narratif de son modèle, Vampires, vous avez dits vampires 2 conjugue avec moins de bonheur et de pétulance comédie/horreur sous l'impulsion d'un trio de héros pour autant attachants si bien que l'on s'implique une fois de plus à leur enjeu de survie sans s'y lasser.


Car même si la nouvelle petite amie de Charlie endossée par la charmante Traci Lind peut paraître un brin potiche, son évolution morale à témoigner de l'existence des vampires nous permet de la juger sous un angle un peu plus favorable (à l'instar de sa combine professionnelle pour sauver Peter Vincent de la camisole et lors de ses exploits héroïques à combattre les vampires), quand bien même l'émotion qu'elle véhicule après de son idylle avec Charlie ne manque pas non plus d'attrait à travers sa candeur naïve. Et donc, si l'impression de déjà vu peut de prime abord rebuter, l'efficacité et le soin de la mise en scène de Tommy Lee Wallace ainsi que quelques nouvelles idées originales (Charlie est cette fois-ci en mutabilité immortelle avant d'être kidnappé par la prêtresse régine, Peter Vincent finit à un moment de l'action interné en psychiatrie, et la filiation entre la nouvelle voisine et le vampire du 1er opus - Jerry Dandrige - reste convaincant pour justifier ses exactions vindicatives) emportent largement l'adhésion. De surcroît, et pour varier la donne d'un climat beaucoup plus lascif que son modèle, le rôle du méchant est imputé à une femme ! Julie Carmen insufflant tout le long du récit un magnétisme sulfureux dans son charisme félin à la fois vénéneux et sensuel. Et si l'action s'avère notamment moins trépidante en seconde partie, on suit tout de même sans piquer du nez les nouvelles stratégies de nos héros pourchassant les vampires hipsters au rythme d'une action horrifique inventive. Les effets spéciaux s'avérant une fois de plus innovants de par leur qualité technique et formelle.


Pas indispensable mais pour autant efficace, fun et distrayant, parfois même envoûtant (les jeux de drague et la danse entre Régine et Charlie sur la sublime mélodie de Brad Fiedel !), Vampires, vous avez dits vampires 2 demeure une fort sympathique séquelle non dénuée de charme et de savoir-faire technique comme l'eut déjà prouvé Tommy Lee Wallace avec le percutant Halloween 3 (sa plus belle réussite à ce jour, mais ceci est une autre histoire). 

La Chronique de son modèle: http://brunomatei.blogspot.com/2011/09/vampires-vous-avez-dit-vampire-fright.html


Bruno Matéï
2èx

vendredi 25 août 2017

MARCHE A L'OMBRE

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site kaxecommons.org

de Michel Blanc. 1984. France. 1h22. Avec Gérard Lanvin, Michel Blanc, Didier Agostini, Sophie Duez, Mimi Félixine, Béatrice Camurat, Prosper Niang, Katrine Boorman.

Sortie salles France: 17 Octobre 1984

FILMOGRAPHIEMichel Blanc est un acteur et réalisateur français, né le 16 avril 1952 à Courbevoie (Hauts-de-Seine). 1984 : Marche à l'ombre. 1994 : Grosse fatigue. 1999 : Mauvaise passe. 2002 : Embrassez qui vous voudrez.


Premiers débuts de Michel Blanc derrière la caméra, Marche à l'ombre totalisa 6,1 millions d'entrées
au box-office français alors que son thème d'actualité traité avec légèreté et dérision (l'exclusion sociale des sans-logis) aurait pu fuir le grand public. Devenu depuis un classique du "buddy movie" auprès de la génération 80, Marche à l'ombre doit largement sa renommée envers la complémentarité du duo Gérard Lanvin / Michel Blanc crevant l'écran dans leur esprit de camaraderie indéfectible ainsi que leurs caractères distincts bien trempés. Michel Blanc endossant un faire-valoir râleur, pleutre, empoté et infortuné avec un naturel bonnard, quand bien même son acolyte Gérard Lanvin lui partage la réplique dans celui d'un débrouillard spartiate constamment rattrapé par son instinct débonnaire. Le tandem éminemment contradictoire dans leurs réflexions professionnelles et sociales cumulant les gaffes et p'tites querelles avec une verve impayable. A ce titre, Michel Blanc, réalisateur, nous a scrupuleusement travaillé ses dialogues avec un sens de l'inventivité à couper au rasoir si bien que rien qu'au niveau des joutes verbales, Marche à l'ombre demeure un régal auditif !


D'une grande simplicité, l'intrigue cinétique nous relate les tribulations de deux itinérants inséparables sillonnant les banlieues parisiennes en quête d'un toit et de p'tits boulots. Complètement à la dèche, ils s'efforcent en désespoir de cause de faire la manche dans les métros avant de sombrer dans le recel et la vente d'objets volés. Durant leur parcours semé de trafalgars, péripéties, rencontres amicales, hostiles et romantiques, ils vont se raccrocher au fil de leur amitié afin de résister à la sinistrose. Ces derniers ne cessant de bifurquer d'un foyer précaire à un autre sans pouvoir s'implanter durablement. Drôle et pittoresque au sein du cadre de la comédie sociale et de l'aventure urbaine si j'ose dire, Marche à l'ombre constitue une petite merveille d'émotions optimistes en dépit de la gravité du sujet (plus qu'actuel !). Michel Blanc se réservant tout pathos et misérabilisme afin de respecter le genre dans lequel il appartient. Pour autant, et par le biais de l'humour, de la légèreté et de la fantaisie, Marche à l'ombre conjugue harmonieusement chaleur humaine, tendresse et générosité auprès d'une galerie de marginaux inscrits dans la solidarité (car désargentés et donc renouant avec la simplicité de leur existence sans la corruption cupide du matérialisme !).


Un hymne à l'amitié et à la débrouille en pleine crise du chômage. 
Trépidant, tendre et constamment cocasse au travers de répliques anthologiques et de bévues rocambolesques, Marche à l'ombre transcende la comédie populaire avec une juste émotion si bien que cet humble témoignage imputé aux laissés pour compte ne cède jamais au pessimisme plombant pour nous chérir. Un dernier mot subsidiaire ! En p'tite amante chétive, la juvénile Sophie Duez ne manque pas d'élégance dans une candeur aussi suave que sensuelle ! 

Bruno Dussart
3èx

jeudi 24 août 2017

LE MONSTRE

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site wrongsideoftheart.com

"The Quatermass Xperiment" de Val Guest. 1955. Angleterre. 1h21. Avec Brian Donlevy, Jack Warner, Margia Dean, Thora Hird, Gordon Jackson.

Sortie salles U.S: Juin 1956. Angleterre: 20 Novembre 1955

FILMOGRAPHIE PARTIELLE: Val Guest de son vrai nom Valmond Guest est un scénariste, réalisateur et producteur britannique né le 11 décembre 1911 à Londres (Royaume-Uni) et décédé le 10 mai 2006 à Palm Springs (Californie). 1954 : La Revanche de Robin des Bois. 1955 : Le Démon de la danse. 1955 : Le Monstre. 1956 : It's A Wonderful World. 1957 : Scotland Yard appelle FBI. 1957 : La Marque. 1957 : Le Redoutable Homme des neiges. 1960 : Expresso Bongo. 1961 : Traitement de choc. 1961 : Le Jour où la Terre prit feu. 1967 : Casino Royale. 1970 : Toomorrow. 1970 : Quand les dinosaures dominaient le monde. 1982 : The Boys in Blue (en). 1984 : Mark of the Devil (en) (TV). 1984 : In Possession (TV). 1985 : Child's Play (TV).


Premier volet de la trilogie Quatermass inspiré de la série TV créée par Nigel Kneale, et première production de la Hammer, Le Monstre se solda par un gros succès public à sa sortie anglaise si bien qu'une suite fut rapidement mise en chantier 2 ans plus tard par Val Guest himself. Quant au troisième opus réalisé tardivement en 1968, Roy Ward Barker prendra le relais pour parfaire un chef-d'oeuvre encore plus retors et abouti que ces congénères, les Monstres de l'Espace. Influencé par la Chose d'un autre monde sortie 4 ans plus tôt, Val Guest nous relate (également) avec souci documenté l'atterrissage en catastrophe d'une fusée commandité par le physicien Quatermass. A bord, seul Victor Carroon parvient à s'y extraire avec l'aide des pompiers alors que ses 2 équipiers ont mystérieusement disparu. Emmené d'urgence à l'hôpital, celui-ci en catatonie semble possédé par une entité invisible (peut-être un spécimen végétale) ayant pour mission de contaminer la terre. Quatermass et la police vont tenter par tous les moyens d'enrayer la chose en constante métamorphose. En conjuguant avec homogénéité science-fiction, épouvante et une pincée de catastrophe, Val Guest parvient à distiller angoisse, suspense, terreur autour du thème d'une invasion extra-terrestre aussi sournoise que La Chose d'un autre monde. D'autre part, et au vu du potentiel de son traitement aussi débridé que singulier, Le Monstre sera une source d'inspiration auprès des générations à venir comme le démontreront les années 80 avec Contamination, MutantLifeforce, le Monstre qui vient de l'Espace et consorts.


Formidablement intense et équivoque durant sa première partie jouant la carte de l'expectative parmi l'effet de suggestion et en se focalisant sur la vision de détails inquiétants (le métabolisme inexpliqué de Victor face à la perplexité des médecins et de son épouse), Le Monstre insuffle l'appréhension à travers la mutabilité d'une victime souffreteuse franchement patibulaire. L'acteur Richard Wordsworth provoquant un vrai malaise dans son désarroi aussi bien physique que moral, et quelques instants de frayeurs (la séquence scrupuleuse de son évasion puis sa planque dans la voiture parmi la complicité de son épouse), notamment grâce à la déliquescence de son apparence rachitique déshéritée d'un regard hagard ! Quant à la découverte des victimes liquéfiées ou surtout momifiées que Tobe Hooper reprendra dans le très attachant Lifeforce, on peut également vanter la qualité artisanale des effets-spéciaux, et ce jusqu'à l'apparence tentaculaire (et non caoutchouteuse) de la chose réduite à un amas d'organes lors d'un final en mode "Catastrophe". Si cette seconde partie autrement suggérée, moins terrifiante et immersive, se focalise sur les déambulations urbaines du monstre un peu plus discret à l'écran, Val Guest parvient pour autant à gérer le suspense grâce à son adroite mise en scène et une narration planifiée parvenant encore à surprendre quant à l'apparence disproportionnée du monstre polymorphe. Et ce jusqu'à son épilogue pour autant pessimiste évoquant une réflexion sur les dangers du progrès technologique à des fins scientifiques, Quatermass nous annonçant l'envoi d'une nouvelle fusée dans l'espace en guise d'orgueil.


Premier grand classique de la Hammer qui permettra à la firme de percer dans l'horreur de manière encore plus couillue et flamboyante (sexe et gore en sus en version technicolor !), le Monstre n'a rien perdu de son impact visuel à crédibiliser un récit de science-fiction où l'horreur des situations s'avère encore aujourd'hui effrayante et malsaine. Et dans ce domaine, on peut largement applaudir le jeu subtilement viscéral de l'acteur mutique Richard Wordsworth littéralement transi de mal-être en zombie végétale. 

Eric Binford
3èx

mardi 22 août 2017

...ET LE VENT APPORTA LA VIOLENCE...

                                                 Photo empruntée sur Google, appartenant au site dvdclassik.com

"E Dio disse a Caino..." de Antonio Margheriti. 1970. Italie/Allemagne de l'Ouest. 1h34. Avec Klaus Kinski, Peter Carsten, Marcella Michelangeli |

Sortie salles France: 30 Décembre 1970. Italie: 5 février 1970

FILMOGRAPHIE: Antonio Margheriti (Anthony M. Dawson) est un réalisateur italien, né le 19 septembre 1930 à Rome, décédé le 4 Novembre 2002 à Monterosi. 1960: Le Vainqueur de l'espace. 1962: Les Derniers jours d'un empire. 1963: La Vierge de Nuremberg. 1964: La Sorcière Sanglante. 1964: Les Géants de Rome. 1964: Danse Macabre. 1968: Avec Django, la mort est là. 1970: Et le vent apporta le Violence. 1971: Les Fantômes de Hurlevent. 1973: Les Diablesses. 1974: La brute, le colt et le karaté. 1975: La Chevauchée terrible. 1976: l'Ombre d'un tueur. 1979: l'Invasion des Piranhas. 1980: Pulsions Cannibales. 1980: Héros d'Apocalypse. 1982: Les Aventuriers du Cobra d'Or. 1983: Yor, le chasseur du futur. 1985: L'Enfer en 4è vitesse.


Western mythique s'il en est, de par son atmosphère crépusculaire aux confins de l'horreur gothique et de la présence magnétique de Klaus Kinski d'un flegme imperturbable, Et le vent apporta la violence élève le film d'ambiance à son firmament. Après 10 ans de bagne, Gary Hamilton retrouve enfin sa liberté après avoir été gracié par la justice. Délibéré à se venger auprès des responsables de son injuste condamnation, il retourne dans son village pour abattre tous les sbires son ancien ami, Acombar, aujourd'hui ennemi juré d'une ignoble trahison. Baignant dans une délicieuse atmosphère d'étrangeté sous l'impulsion d'une tempête d'outre-tombe, second rôle éthéré de l'histoire, Et le vent apporta la violence nous immerge de plein fouet dans une ambiance d'isolation au sein d'un village maudit. De par la complicité vénale de tous les responsables de la réclusion d'Hamilton et de l'intrusion soudaine de ce dernier délibéré à les exterminer un à un. Abordant le thème de la vengeance dans sa représentation la plus véreuse si bien que dès le départ Hamilton autrefois innocent nous exprime ouvertement sa damnation depuis sa motivation punitive, Antonio Margheriti fignole le cadre sépulcrale de sa tragédie macabre.


En brossant également les profils des seconds-rôles couards davantage gagnés par la peur du trépas (notamment l'ancienne maîtresse d'Hamilton incapable de canaliser ses affres au moment des retrouvailles !), voir même le remord ostensiblement avoué chez l'un d'eux ou autrement tacite du point de vue d'Acombar hanté de culpabilité. Mais au préalable, Margheriti développe lestement le cas docile du fils de celui-ci s'efforçant de découvrir la vérité sur l'étranger depuis sa longue absence au village. Le seul personnage véritablement candide de l'histoire mais pour autant contraint de céder in extremis à la trahison et à la corruption afin de préserver l'honneur de sa famille. Cette intensité dramatique qui émane du désarroi d'antagonistes impliqués dans un redoutable enjeu de survie permet à l'intrigue de redoubler d'efficacité sous le pilier de leur psychologie fébrile. Quand aux somptueux décors domestiques d'un gothisme inopinément flamboyant, on se croirait dans une oeuvre baroque de Roger Corman durant sa période florissante des adaptations de Poe, quand bien même Kinski perdure à traîner sa dégaine rigide à l'instar d'un fantôme errant sous l'acuité du regard impassible ! (notamment ses jeux de miroir invoqués sur sa présence ubique lors d'une ultime confrontation à la lisière du surnaturel !)


Modeste série B transfigurée par la perméabilité de son esthétisme mortifère et l'intensité d'une intrigue vénéneuse auquel personne ne pourra accoster la rédemption, Et le vent apporta la violence confine au chef-d'oeuvre du western crépusculaire, poème tragique sur l'engrenage de la vengeance habité par un Kinski aussi bien hypnotique qu'étrangement ambigu. 

Bruno Dussart
3èx

...Et le vent apporta la violence...
...Et Dieu dit à Caïn:
par ton crime tu as crée le mal 
et le sang versé retombera sur toi
et sur ta descendance qui ira 
errante et vagabonde sur la terre. 

lundi 21 août 2017

LE CLAN DE LA CAVERNE DES OURS

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site senscritique.com

"The Clan of the Cave Bear" de Michael Chapman. 1986. U.S.A. 1h41. Avec Daryl Hannah, Emme Floria, Pamela Reed, James Remar, Thomas G. Waites, John Doolittle, Curtis Armstrong.

Sortie salles France: 6 Août 1986. U.S: 17 Janvier 1986

FILMOGRAPHIE: Michael Chapman est un directeur de la photographie américain, né le 21 novembre 1935 (81 ans) à Wellesley, Massachusetts. Il est aussi acteur, opérateur caméra, réalisateur.1983 : L'Esprit d'équipe. 1986 : Le Clan de la caverne des ours. 1986 : Annihilator, le destructeur. 1995 : The Viking Sagas.


Echec public lors de sa sortie en salles et sombré dans l'oubli depuis son exploitation Vhs locative, Le Clan de la Caverne des ours s'inspire du chef-d'oeuvre de Jean Jacques Annaud pour mettre en exergue un récit d'aventures préhistoriques truffé d'émotions, et ce même s'il cède parfois à la naïveté des bons sentiments. En toute simplicité, le récit retrace le périple ardu de Ayla, petite orpheline chaudement recueillie par le clan de la caverne des ours après la mort accidentelle de sa mère. Parvenant à se faire une place au sein du groupe, elle est toutefois discréditée par le fils du chef, Broud, n'hésitant pas à moult reprises à la violer. Armée de courage et de désir d'émancipation, elle va tenter d'imposer sa dignité et ses valeurs durant sa quête identitaire. Sous le moule de la série B ludique dénuée de prétentions, Michael chapman n'a pas pour ambition de singer le modèle d'Annaud en dépit de quelques thèmes similaires dénoncés (la condition de la femme au sein d'un peuple machiste ultra conservateur et les viols qu'ils perpétuent dans l'impunité) si bien qu'il s'intéresse ici à nous décrire la vie moderne des hommes de cro-magnon durant la période du Paléolithique moyen.


Bien conscient de ses moyens précaires à authentifier sa scénographie préhistorique mais pour autant rehaussé des magnifiques décors naturels du Canada (photo saturée à l'appui), le réalisateur lésine sur l'esbroufe (en dépit d'une étonnante scène de combat avec un ours !) pour se concentrer avec attention et chaleur humaine sur les conditions de vie primitives d'un clan en apprentissage existentiel. Et ce sous l'impulsion d'une héroïne en herbe peu à peu farouche et maternelle. Car curieuse, pédagogue et avide de liberté, Ayla va y transgresser quelques règles, ce qui aura comme conséquence une nouvelle prise de conscience (plus tolérante) de la part du clan après avoir été sujette au châtiment et à l'exclusion. Par le biais de cette icone subversive, Michael Chapman nous dresse un joli portrait de femme rebelle que la charmante Darryl Hannah insuffle avec une belle dignité. Les autres seconds-rôles particulièrement attachants dans leur dynamique de groupe se prêtant au jeu du mimétisme et du langage inaudible (les paroles sont sous-titrées en français dans la VO) avec un brin de naïveté non dénué de charme et parfois même d'intensité.


Epaulé du score lyrique et émotif d'Alan Silvestri sous le pilier d'une honnête distribution, Le clan de la caverne des ours parvient à séduire à travers un joli récit d'aventures militant pour la sagesse, l'enseignement et la tolérance du point de vue d'une affranchie en initiation de maturité. Sans prétention aucune car retranscrit avec autant de simplicité que de sincérité (d'où son charme innocent qui y découle !), il s'avère à mon sens le meilleur succédané de (l'inégalé) la Guerre du Feu. 

P.S: Le dvd édité chez TF1 ne comportant pas de VOSTFR, il faut donc se rabattre sur sa VF absconse car non sous-titrée.

Bruno Matéï
2èx

vendredi 18 août 2017

HIGHT SPIRITS

                                           Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemapassion.com

de Neil Jordan. 1988. Angleterre/U.S.A. 1h39 Avec Steve Guttenberg, Daryl Hannah, Peter O'Toole, Beverly D'Angelo, Liam Neeson, Martin Ferrero, Jennifer Tilly.

Sortie salles France: 18 Janvier 1989. U.S.A: 18 Novembre 1988

FILMOGRAPHIE: Neil Jordan est un réalisateur, producteur, scénariste et écrivain irlandais, né le 25 Février 1950 à Sligo. 1982: Angel. 1984: La Compagnie des Loups. 1986: Mona Lisa. 1988: High Spirits. 1989: Nous ne sommes pas des Anges. 1991: L'Etrangère. 1992: The Crying Game. 1994: Entretien avec un Vampire. 1996: Michael Collins. 1997: The Butcher Boy. 1999: Prémonitions. 1999: La Fin d'une Liaison. 2002: L'Homme de la Riviera. 2005: Breakfast on Pluto. 2007: A vif. 2009: Ondine. 2012: Byzantium. 


Echec public lors de sa discrète sortie en salles alors qu'il s'agissait de l'unique incursion de Neil Jordan dans la comédie, High Spirits conjugue avec une bonne humeur souvent expansive cocasserie et fantastique à travers le thème des esprits (farceurs). Oublié à tort depuis sa confection et peu diffusé à la TV, High Spirits empreinte le schéma de la série B décomplexée au travers d'une intrigue sommaire riche en quiproquos, incidents surnaturels et étreintes amoureuses. Neil Jordan s'appliquant avec intégrité à nous relater les vicissitudes d'une poignée de touristes débarqués au sein d'un manoir sclérosé. Le propriétaire des lieux alcoolo et au bord du suicide (que le cabotin Peter O'Toole campe avec une irrésistible dérision !) s'évertuant à séduire sa frêle clientèle par l'entremise de fantômes risibles que lui et ses comparses ont mis au point à l'aide de trucages vieux comme le monde. 


Seulement, après avoir cerné la supercherie, les hôtes vont soudainement se confronter à de véritables fantômes; quand bien même Jack Crawford va profiter de son idylle naissante avec une revenante afin de fuir son épouse acariâtre ! A travers cette intrigue simpliste plutôt redondante il faut l'avouer dans ses jeux de drague que s'échangent un couple de fantômes avec un couple d'humains, High Spirits amuse pour autant la galerie sous l'impulsion de gags pittoresques qu'une foule d'acteurs enchaînent avec exubérance contagieuse. Si la première demi-heure, la plus réussie dans sa démarche autoparodique, privilégie les situations comiques avec inventivité et vigueur effrénées, la suite s'oriente plus du côté de la romance à travers les charmants duos que forment Steve Guttenberg Daryl Hannah et Beverly D'Angelo / Liam Neeson (à ses touts débuts dans une prestance subalterne) s'efforçant mutuellement d'adhérer à l'amour surnaturel. Bien que Neil Jordan abuse de temps à autre d'une esbroufe parfois gratuite par le biais d'effets-spéciaux néanmoins réussis, on lui pardonne ses facilités tant l'insolence des évènements surnaturels nous amusent constamment avec un esprit vintage (notamment ses décors marins de carton pâte se matérialisant soudainement sous nos yeux !). 


En dépit d'un rythme parfois défaillant saupoudré de quelques longueurs et d'un scénario à la fois linéaire et sans surprise (on devine aisément l'issue finale pour les 2 couples en ascension amoureuse), High Spirits parvient à distraire avec une simplicité aussi charmante qu'attendrissante. Sa modeste réussite résidant surtout dans la complicité festive des comédiens d'une spontanéité et d'une fraîcheur galvanisantes (jusqu'aux moindres seconds-rôles pétillants de naïveté - Meg Tilly en tête ! -). Enfin, tout en s'attachant peu à peu à l'onirisme candide d'une romance improbable, on se laisse aussi enivrer par l'esthétisme gothique du vaste manoir confiné à proximité d'une nature crépusculaire. 

Bruno Dussart
3èx

jeudi 17 août 2017

ELLE S'APPELAIT SCORPION

                                             Photo empruntée sur Google, appartenant au site senscritique.com

"Joshuu sasori: Dai-41 zakkyo-bô / Female Convict Scorpion Jailhouse 41" de Shunya Ito. 1972. Japon. 1h28. Meiko Kaji, Fumio Watanabe, Kayoko Shiraishi, Yukie Kagawa.

Sortie salles Japon: 30 Décembre 1972. France: 22 April 2011 (Lyon Festival Hallucinations Collectives)

FILMOGRAPHIEShun’ya Itō (伊藤 俊也, Itō Shun’ya?) est un réalisateur japonais né le 17 Février 1937. 1972 : La femme scorpion. 1972 : Elle s'appelait scorpion. 1973 : La tanière de la bête. 1982 : Piège pour un Kidnapper. 1985 : Gray Sunset. 1988 : Labyrinth of Flower Garden. 1995 : Adieu, Nostradamus ! 1998 : Pride: The Fateful Moment.


Second volet d'une saga légendaire de 6 films et considéré comme le plus réussi, Elle s'appelait Scorpion empreinte le schéma du WIP ("women in prison") avant de bifurquer fissa vers le rape and revenge et le survival lorsqu'une poignée de prisonnières parviennent à s'échapper de leur geôle grâce à la complicité de l'indomptable Matsu. Une détenue tête de turc passée maître dans l'art de l'évasion mais pour autant molestée par ses propres rivales jouant l'indépendance à travers leur haine, leur jalousie, leur rancoeur et leur vengeance. Durant un houleux périple, elles n'auront de cesse de s'opposer à la police et aux gardiens lancés à leur trousse quand bien même les touristes d'un car vont leur servir d'otages afin de déjouer un barrage.


Sous le moule d'une série B d'exploitation alternant à rythme métronomique, sévices corporels, viols, humiliations et règlements de compte sanglants entre détenues et gynophobes (le terme est on ne peut mieux approprié !), Elle s'appelait Scorpion aurait pu sombrer dans le produit lambda si la mise en scène hyper stylisée n'avait su faire preuve d'autant de fulgurances visuelles, à mi-chemin de la bande dessinée, du western et du conte moderne. Véritable trip expérimental baignant dans un onirisme baroque, notamment de par ses décors géométriques, Elle s'appelait Scorpion se vit à l'instar d'un rêve éveillé sous la mainmise d'une anti-héroïne mutique (elle prononce à peine 3 phrases durant tout le métrage !) que campe avec pudeur la troublante Meiko Kaji. Sa présence spectrale inscrite dans le non-dit et l'intensité de son regard impassible restant une énigme chez le spectateur incapable d'en défricher sa véritable identité. Cruel, cynique et ultra violent, le récit suggère la métaphore sur l'émancipation féminine lorsque ces dernières sont traitées comme du bétail par des machistes sans vergogne. A cet égard, la ligue féministe devrait s'en réjouir puisque tous les protagonistes mâles qu'on nous présentent outrancièrement s'avèrent des ordures libidineuses n'hésitant pas d'autre part à bafouer leur déontologie pour mieux parvenir à leurs fins. Tandis que les fugitives, assoiffées de haine et de liberté, n'hésiteront pas à recourir à la vendetta expéditive durant leur traque de survie.  


Prenant à contre pied la norme du divertissement jouissif, Elle s'appelait Scorpion opte pour les ruptures de ton, l'expressionnisme baroque (photo contrastée à l'appui) et les expérimentations alambiquées afin de perdre sens et repères du spectateur embarqué dans une série B hybride quasi surnaturelle. A la lisière de la féerie macabre mais plutôt difficile d'accès, cette perle culte au pouvoir de fascination subtilement trouble et capiteux porte la signature du talent personnel de Shun’ya Itō.

Bruno Dussart
2èx

mercredi 16 août 2017

UNE MESSE POUR DRACULA

                                               Photo empruntée sur Google, appartenant au site Notrecinema.com


"Taste the Blood of Dracula" de Peter Sasdy. 1970. Angleterre. 1h31. Avec Christopher Lee, Geoffrey Keen, Gwen Watford, Linda Hayden, Peter Sallis, Anthony Corlan, Isla Blair.

Sortie salles France: 7 Octobre 1970. U.S: 7 Juin 1970

FILMOGRAPHIEPeter Sasdy est un réalisateur britannique né le 27 mai 1935 à Budapest. 1970 : Une messe pour Dracula. 1971 : La Fille de Jack l'Éventreur. 1971 : Comtesse Dracula. 1972 : Doomwatch. 1973 : Nothing But the Night. 1975 : Evil Baby. 1983 : The Lonely Lady.


Suite directe de Dracula et les femmes, Une messe pour Dracula est le 5è volet consacré au prince des ténèbres que Peter Sasdy dirige pour la première fois sous l'égide de la Hammer. A partir d'un scénario assez faiblard mais non exempt d'originalité, à l'instar de cette séance envoûtée de messe noire plutôt malsaine et à la résurrection qui s'ensuit, Une Messe pour Dracula est transcendé par l'efficacité d'une réalisation scrupuleuse où rien n'est laissé au hasard, par sa fulgurance gothique traversée d'images picturales à damner un saint, et d'un jeu d'acteurs parfaitement impliqués dans leur périple de survie où le désarroi gagne du terrain. En gros, trois notables plutôt dévergondés (on les rencontre de prime abord dans un bordel de catins aux poitrines ouvertement opulentes) se laissent influencer par un Lord adepte d'une messe noire bien spécifique. Car au sein d'une église décatie, ce dernier a pour ambition de réanimer le prince des ténèbres parmi leur frêle complicité. Mais la séance tourne au fiasco lorsque les hôtes terrorisés à l'idée de boire le sang de Dracula cèdent à la panique quand bien même le lord s'empresse d'ingurgiter lui même la potion avant d'être pris de convulsions.


C'est alors que ces derniers se ruent sur lui pour le battre à mort. Quelques jours après le drame, et alors que chacun des coupables se confinent dans le mutisme (voir l'alcoolisme pour l'un d'entre eux) au sein de leur foyer, Dracula parvient toutefois à renaître de ses cendres en prenant possession du corps du Lord Courtley. Uniquement bâti sur la vengeance de Dracula délibéré à venger la mort de son serviteur auprès des responsables, Une messe pour Dracula parvient pour autant à captiver grâce à la corruption de ces trois criminels rongés par le remord et l'angoisse de passer sous les verrous quand bien même les seconds-rôles féminins assujettis au prince font preuve d'un charme vénéneux dans leur posture pernicieuse. Bien évidemment, chacun des trois coupables périra de manière aussi cruelle que perfide si bien que Dracula utilise à chaque fois la complicité de ses maîtresses sous l'impulsion de l'hypnose. Une fois de plus, dans sa stature ténébreuse et longiligne, Christopher Lee crève l'écran à chacune de ses apparitions spectrales. Peter Sasdy cadrant l'acteur affublé d'une longue cape noire de manière stylisée afin de rehausser l'aspect surnaturel de sa présence sépulcrale.


Série B d'exploitation transfigurée par un esthétisme flamboyant (plusieurs images picturales sont franchement sublimes sous la lumière d'une photo sépia), une réalisation efficace et le talent spontané de comédiens dandy, Une Messe pour Dracula fascine irrémédiablement au sein d'une narration classique tantôt audacieuse par son climat malsain (la longue séance de messe noire s'avère le moment le plus intense et inquiétant, notamment auprès de sa poésie macabre !), son onirisme expérimental loin d'être banal (la mort vertigineuse de Dracula !) et enfin son érotisme démonstratif (la séquence du bordel) qui lui vaudra à l'époque quelques vétilles avec dame censure. 

Bruno Dussart
2èx

mardi 15 août 2017

DEUX YEUX MALEFIQUES

                                            Photo empruntée sur Google, appartenant au site wrongsideoftheart.com

"Due occhi diabolici / Two Evil Eyes" de George A. Romero et Dario Argento. 1990. U.S.A/Italie. 1h59. Avec Adrienne Barbeau, Ramy Zada, Bingo O'Malley, Jeff Howell, Harvey Keitel, Madeleine Potter, John Amos, Sally Kirkland, Kim Hunter.

Sortie salles France : 8 juillet 1992. États-Unis : 25 octobre 1991. Italie : 25 janvier 1990

FILMOGRAPHIE: Dario Argento est un réalisateur et scénariste italien né le 7 septembre 1940, à Rome (Italie). 1969: l'Oiseau au plumage de Cristal, 1971: Le Chat à 9 queues, Quatre mouches de velours gris, 1973: 5 Jours à Milan, 1975, Les Frissons de l'Angoisse, 1977: Suspiria, 1980: Inferno, 1982: Ténèbres, 1985: Phenomena, 1987: Opera, 1990: 2 yeux Maléfiques, 1993: Trauma, 1996: Le Syndrome de Stendhal, 1998: Le Fantome de l'Opéra, 2001: Le Sang des Innocents,2004: Card Player, 2005: Aimez vous Hitchcock ?, 2005: Jennifer (épis Masters of Horror, sais 1), 2006: J'aurai leur peau (épis Masters of Horror, sais 2), 2006: Mother of Tears, 2009: Giallo, 2011: Dracula 3D.
George Andrew Romero est un réalisateur, scénariste, acteur, auteur américain, né le 4 Février 1940 à New-York, et décédé le 16 juillet 2017 à Toronto. 1968: La Nuit des Morts-vivants. 1971: There's Always Vanilla. 1972: Season of the Witch. 1973: The Crazies. 1977: Martin. 1978: Zombie. 1981: Knightriders. 1982: Creepshow. 1985: Le Jour des Morts-vivants. 1988: Incidents de parcours. 1990: Deux Yeux Maléfiques. 1992: La Part des Ténèbres. 2000: Bruiser. 2005: Land of the Dead. 2008: Diary of the Dead. 2009: Survival of the Dead. 2011: Deep Red.


Inspiré de deux nouvelles d'Edgar Allan Poe, les maîtres de l'horreur George A. Romero et Dario Argento s'étaient réunis en 1990 pour un diptyque. A savoir la conjugaison de deux segments d'une durée de 55 minutes chacune, pour le meilleur et le moins bon. On commence donc avec le plus faible, La Vérité sur le cas de Monsieur Valdemar que George Romero nous emballe sans trop de fougue en dépit de l'originalité d'un pitch déjà beaucoup mieux traité dans le formidable Empire de la Terreur de Roger Corman (saisissante interprétation de Vincent Price en sus dans le rôle éponyme !). En gros, un couple d'amants tente d'escroquer le mari alité par le pouvoir de l'hypnose. Seulement, alors qu'ils salivent d'impatience à empocher l'héritage, ce dernier succombe prématurément à sa maladie. Ce qui remet en question le complot machiavélique des amants maudits. Au-delà du jeu parfaitement convaincant de Ramy Zada (en amant meurtrier burné) et d'Adrienne Barbeau (en complice pleutre hantée par le remord), La vérité sur le cas de Mr Valdamar peine à insuffler de l'intensité dans son récit macabre faisant intervenir au terme la figure du mort-vivant (une séquence d'autant plus fade dans son effet de surprise recherché !). Toutefois mis en scène avec un certain savoir-faire par son ambiance d'étrangeté quelque peu palpable, ce sketch se suit sans déplaisir et éveille même la stupeur lors d'une scène gore incroyablement percutante que Tom Savini transcende avec son habituel professionnalisme.


Le second sketch, le Chat Noir nous illustre la dérive meurtrière d'un photographe à sensations superbement campé par un Harvey Keitel transi de fascination morbide, et ce avant de succomber au vice le plus répréhensible ! En collaboration avec la police, il opère les clichés de victimes retrouvées sauvagement agressées sur la scène du crime mais finit peu à peu par se laisser séduire par le vertige du voyeurisme malsain ! Par l'entremise de cette déviance immorale, Savini nous concocte quelques visions horrifiques du plus bel effet ! Vivant paisiblement avec sa maîtresse, Roderick Fisher est aujourd'hui agacé par l'intrusion d'un chat que celle-ci vient d'adopter. De plus en plus soupe au lait car irrité par son omniprésence, il décide de se débarrasser de l'animal avant de sombrer dans une folie meurtrière. Original, débridé (notamment ce cauchemar éveillé que ce dernier subit durant l'époque médiévale en guise de châtiment !), pervers et sadique, Le Chat Noir est mené sur un rythme sans faille sous l'impulsion orgueilleuse d'un Harvey Keitel aussi bien détestable que couard ! Emaillé de scènes chocs une fois de plus incisives et très sanglantes, ce récit dépravé illustrant la déchéance sadique du photographe obsédé par la superstition du chat captive jusqu'à sa chute prévisible mais pour autant détonante lorsque Dario Argento y apporte à nouveau sa patte personnelle à une conclusion déjà connue. Car nonobstant une partition franchement peu inspirée, pour ne pas dire inadéquate, le Chat Noir nous entraîne dans une vénéneuse descente aux enfers parmi la compagnie secondaire de chats délétères dans leur esprit de revanche.


Si Deux yeux maléfiques n'est pas le sommet horrifique escompté de la part des deux grands maîtres, le segment du Chat Noir s'avère suffisamment ludique, audacieux, fou et surtout redoutablement pervers sous l'impulsion viciée d'Argento et Keitel en étroite complicité démoniaque.  

Eric Binford.
3èx

lundi 14 août 2017

Hurlements / The Howling. Prix de la Critique, Avoriaz 81.

                                                  Photo empruntée sur Google, appartenant au site cinemovies.fr
 
de Joe Dante. 1980. U.S.A. 1h30. Avec Dee Wallace, Patrick Macnee, Dennis Dugan, Christopher Stone, Belinda Balaski, Kevin McCarthy, John Carradine, Slim Pickens, Elisabeth Brooks, Robert Picardo.

Sortie salles France: 21 Janvier 1981. U.S: 10 Avril 1980

FILMOGRAPHIEJoe Dante (né le 28 novembre 1946 à Middletown, New Jersey) est un critique, scénariste, monteur, producteur et réalisateur américain. Son plus grand succès populaire est, à ce jour, Gremlins (1984). 1966-1975 : The Movie Orgy 1976 : Hollywood Boulevard, co-réalisé avec Allan Arkush 1978 : Piranhas (Piranha),1981: Hurlements (The Howling) 1983 : La Quatrième Dimension (Twiling Zone the Movie), troisième épisode, Its a Good Life 1984 : Gremlins 1985 : Explorers 1987 : Cheeseburger film sandwich (Amazon Women on the Moon), 5 sketches 1987 : L'Aventure Intérieure. 989 : Les Banlieusards (The 'burbs) 1990 : Gremlins 2, la nouvelle génération (Gremlins 2 The New Batch) 1993 : Panic sur Florida Beach (Matinee) 1998 : Small Soldiers 2003 : Les Looney Tunes passent à l'action (Looney Tunes : Back in Action) 2006 : Trapped Ashes , premier segment,Wraparound 2010 : The Hole. 2014: Burying the ex


Trois ans après Piranhas, démarquage semi parodique des Dents de la merJoe Dante livre avec Hurlements sa déclaration d'amour au mythe du loup-garou dépoussiéré ici dans un contexte contemporain. Saupoudré d'humour noir et de clins d'oeil, cette référence du fantastique moderne doit aussi son salut au talent respectif des maquilleurs Rob Bottin et Rick Baker car plus de 40 ans après sa sortie et son trophée à Avoriaz (Prix de la critique !), Hurlements resplendit toujours dans sa faculté de nous faire croire à l'existence du lycanthrope, sans effets de manche. Le pitchUne éminente journaliste, Karen White, doit rencontrer le mystérieux Eddie Quist soupçonné de meurtre. Après que ce dernier entrepris une rencontre dans un sex-shop, elle se retrouve confinée dans une cabine parmi sa présence. Prise de panique d'après une vision horrifiée, elle clame de l'aide ! Alors qu'un véhicule de police patrouillait à proximité, l'un des flics pointe son arme en direction de l'agression et abat froidement l'assaillant. Souffrant d'amnésie, Karen et son époux sont envoyés dans un séminaire thérapeutique sous la mainmise du Dr George Waggner.


Sorti la même année, à quelques mois d'intervalle de son homologue Le Loup-Garou de Londres, Hurlements évoque une certaine parité. Un esprit sarcastique influencé par l'humour noir (satire sur l'addiction carnivore parmi l'instinct sauvage du loup enfoui en chaque homme !), un contexte moderne afin de raviver son monstre iconique et des effets spéciaux révolutionnaires aussi bluffants que percutants. Si ce joyau de série B reste en l'occurrence aussi ensorcelant, c'est aussi bien pour sa maîtrise formelle, pour ses scènes chocs parfois cruelles (les morts inopinées de deux protagonistes) que pour la caractérisation ironique d'antagonistes sournois, à l'instar du Dr Wagner que campe avec aplomb Patrick Macnee. Un psychologue prévenant tant et si bien qu'il épaule ses patients à canaliser leurs pulsions primitives particulièrement meurtrières lorsqu'ils s'adonnent à leur instinct naturel. Car depuis l'évolution de notre civilisation moderne, nos loups-garous réactionnaires sont aujourd'hui acculés à refréner leur pulsion primale pour se contenter de consommer des bovins domestiques. Pour autant, les plus anarchistes d'entre eux bafouent leur déontologie afin de céder à leur besoin primal de chair fraîche ! D'un aspect formel, les décors champêtres d'une forêt nappée de brume ainsi que sa photo saturée de teintes azurs et orangées transfigurent simultanément une ambiance crépusculaire à l'orée de la fantasmagorie. 


Quand bien même sa structure narrative à la fois simple et efficacement contée, son angoisse envoûtante parfois palpable (surtout durant les sèquences nocturnes) et l'intensité de sa partition orchestrée par Pino Donaggio sont d'autant mieux valorisés d'FX artisanaux jamais gratuits car découlant du cheminement fouineur de nos héros en quête d'indices et de réponses. Pour cause, la métamorphose (au compte-goutte) d'Eddie transformé en lycanthrope reste un moment d'anthologie impressionnant de réalisme et de rigueur, alors même que la victime en catatonie contemple cette vision improbable avec une fascination terrifiée ! En prime, le climat angoissant émanant du comportement démuni des héroïnes en investigation s'exacerbe de beuglements perçus du fond de la forêt alors que ces dernières y redoutent une présence sous-jacente. Outre cette atmosphère ouateuse délicieusement capiteuse au sein d'une facture cinégénique, on peut également souligner le caractère torride d'une étreinte restée anthologique (les amants infidèles en coït durant une nuit de pleine lune). Enfin, comédiens notables et seconds couteaux (nos briscards John Carradine, Dick Miller et Kevin McCarthy, l'envoûtante et oh combien provocante Belinda Balaski puis enfin l'aimable Patrick MacNee) affichent une belle complémentarité dans leur talent spontané à se fondre dans des personnages tantôt rassurants, tantôt cyniques si je me réfère aux membres de la colonie. Quant à la très charmante Dee Wallace (je ne l'ai jamais vu aussi mignonne et glamour que dans ce rôle de journaliste !), elle vole quasiment la vedette à ces confrères et consoeurs dans sa posture fragile d'amnésique en proie au surnaturel. Spoil ! D'ailleurs, à travers sa dernière allégation télévisée, nous ne sommes pas prêts d'oublier son adieu salvateur sous l'écho d'un hurlement poignant étonnamment poignant et fulgurant Fin du Spoil.    


Dirigé avec soin par un cinéaste transi d'amour pour son bestiaire lycanthrope, Hurlements fait office de référence incontournable dans sa capacité à nous illustrer un conte horrifique d'une modernité étonnamment fascinante. Son charme prégnant émanant notamment de sa grande simplicité à traiter du thème lycanthrope dans l'art de le conter auprès d'une dynamique de groupe (oh combien attachante). Reste à savoir qui pourra un jour transcender, sinon égaler son talent artisanal (aussi bien auteur que techniciens !) car les chefs-d'oeuvre sont inoxydables et, à l'instar du Loup-garou de Londres mais aussi de la Nuit du Loup-garou, Hurlements n'a point à rougir de ses congénères.

Pour la p'tite anecdote personnelle, c'est le tout premier film d'horreur que j'ai pu voir dans une salle de ciné un mardi-après midi de congé scolaire en compagnie de ma tante. Un traumatisme fascinatoire inégalé (à l'exception de Frayeurs et de l'Exorciste).

*Bruno
 
25.04.12 (273 V)
14/08/17
31.07.23. 10èx

Récompense: Prix de la Critique à Avoriaz 1981